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European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T045199.20030314
Date de la décision : 14 Mars 2003
Numéro de l’affaire : T 0451/99
Décision de la Grande Chambre des recours G 0002/03
Numéro de la demande : 86902998.3
Classe de la CIB : C12Q 1/70
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande :
Nom du demandeur : GENETIC SYSTEMS CORPORATION
Nom de l’opposant : Dade Behring Marburg GmbH
Roche Diagnostics GmbH
Chambre : 3.3.04
Sommaire : Les questions suivantes sont soumises à la Grande Chambre de recours :
Un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande telle que déposée est-il recevable et la revendication dans laquelle il est introduit est-elle par conséquent admissible au regard de larticle 123(2) CBE lorsque le disclaimer vise à répondre à une objection d’absence de nouveauté au titre de l’article 54(3) CBE?
Dans l’affirmative, quels sont les critères applicables pour apprécier la recevabilité du disclaimer ?
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54(3)
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 112(1)
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
Mot-clé : Admissibilité des disclaimers – au regard de l’article 123(2) CBE – délimitation par rapport à un état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE – critères applicables – saisine de la Grande Chambre de recours
Exergue :

Décisions citées :
G 0003/89
G 0001/93
G 0002/98
T 0004/80
T 0433/86
T 0124/87
T 0170/87
T 0288/92
T 0434/92
T 0597/92
T 0653/92
T 0710/92
T 0426/94
T 0917/94
T 0982/94
T 0596/96
T 0608/96
T 0863/96
T 0013/97
T 0323/97
T 0934/97
T 1125/97
T 0318/98
T 0339/98
T 0351/98
T 0043/99
T 0525/99
T 0664/00
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0001/03
G 0002/10
T 0590/98
T 1049/99
T 0426/00
T 0810/00
T 1131/01
T 1107/06
T 1870/08
T 1872/14

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 0 220 273 intitulé “Antigènes synthétiques pour la détection d’une maladie liée au SIDA”, qui se fonde sur la demande internationale n° WO 86/06414, a été délivré avec 43 revendications.

La revendication 1 du brevet tel que délivré s’énonce comme suit:

“1. Méthode pour détecter la présence de virus LAV/HTLV-III ou d’anticorps au virus LAV/HTLV-III où un échantillon est combiné avec une composition ayant des sites épitopiques immunologiquement compétitifs avec les sites épitopiques LAV/HTLV-III, de sorte que les anticorps se lient à une telle composition de protéines pour former un complexe spécifique de paire liante et la quantité de formation du complexe est déterminée, caractérisée par :

l’emploi dans le milieu test en tant que réactif d’une composition contenant au moins un peptide qui a au moins six acides aminés et moins de 50 acides aminés, au moins six de ces acides aminés sont contigus et encodés pour par partie de la région codante de LAV/HTLV- III à partir de bp 450 à bp 731 à partir de la région gag ou bp 900 à bp 1421 (à partir de la région gag) ou bp 7210 à bp 7815 (à partir de la région env).”

II. Des oppositions ont été formées à l’encontre du brevet sur le fondement de l’article 100a), b) et c) CBE (absence de nouveauté et d’activité inventive, insuffisance de l’exposé et adjonction d’éléments). Conformément à l’article 102(3) CBE, la division d’opposition a décidé de maintenir le brevet sous une forme modifiée, sur la base de la troisième requête subsidiaire figurant alors au dossier.

III. Le titulaire du brevet (requérant I) a formé un recours contre cette décision en demandant l’annulation de la décision et le maintien du brevet sur la base d’une nouvelle requête principale ou d’une nouvelle première requête subsidiaire, toutes deux produites avec le mémoire exposant les motifs du recours. Un nouveau jeu de revendications a été déposé en tant que deuxième requête subsidiaire par lettre du 24 mai 2002. Dans une troisième requête subsidiaire (mentionnée en tant que deuxième requête subsidiaire dans le mémoire de recours), le titulaire du brevet a demandé le maintien du brevet sur la base du texte arrêté dans la décision entreprise.

L’opposant 2 (requérant II) a lui aussi formé un recours dans lequel il a demandé l’annulation de la décision entreprise et la révocation du brevet.

Par lettre du 29 décembre 1999, l’opposant 1, qui était de droit partie à la procédure en vertu de l’article 107 CBE, a présenté ses observations sur le mémoire exposant les motifs du recours du requérant I et demandé le rejet de ce recours.

IV. La nouvelle requête principale du requérant I correspondait à la requête principale qui avait été rejetée par la division d’opposition, à la différence que sa revendication 1 était identique à la revendication 1 selon la requête à laquelle la division d’opposition avait fait droit. Cette revendication s’énonce comme suit :

“1. Méthode pour détecter la présence de virus LAV/HTLV-III ou d’anticorps au virus LAV/HTLV-III où un échantillon est combiné avec une composition ayant des sites épitopiques immunologiquement compétitifs avec les sites épitopiques LAV/HTLV-III, de sorte que les anticorps se lient à une telle composition de protéines pour former un complexe spécifique de paire liante et la quantité de formation du complexe est déterminée, caractérisée par :

l’emploi dans le milieu test en tant que réactif d’une composition contenant au moins un peptide qui a au moins six acides aminés et moins de 50 acides aminés, au moins six de ces acides aminés sont contigus et codés par la partie de la région codante de LAV/HTLV-III allant de bp 450 à bp 731 (dans la région gag) ou allant de bp 900 à bp 1421 (dans la région gag) ou allant de bp 7210 à bp 7815 (dans la région env), à l’exception des peptides suivants :

a) peptides de la région gag définie comme débutant à l’acide aminé 1 – Met codé par l’ATG en position 336-338 dans la séquence d’ADN de LAV :

composés des acides aminés 37-46, c.-à-d. Ala-Ser-Arg-Glu-Leu-Glu-Arg-Phe-Ala-Val ;

composés des acides aminés 49-79, c.-à-d. Gly-Leu-Leu-Glu-Thr-Ser-Glu-Gly-Cys-Arg-Gln- Ile-Leu-Gly-Gln-Leu-Gln-Pro-Ser- Leu-Gln-Thr-Gly-Ser-Glu-Glu-Leu-Arg-Ser-Leu-Tyr ;

composés des acides aminés 200-220, c.-à-d. Met-Leu-Lys-Glu-Thr-Ile-Asn-Glu-Glu-Ala-Ala-Glu-Trp- Asp-Arg-Val-His- Pro-Val-His-Ala ;

composés des acides aminés 226-234, c.-à-d. Gly-Gln-Met-Arg-Glu-Pro-Arg-Gly-Ser ;

composés des acides aminés 239-264, c.-à-d. Thr-Thr-Ser-Thr-Leu-Gln-Glu-Gln-Ile-Gly-Trp-Met-Thr- Asn-Asn-Pro-Pro- Ile-Pro-Val-Gly-Glu-Ile-Tyr-Lys-Arg ;

composés des acides aminés 288-331, c.-à-d. Gly-Pro-Lys-Glu-Pro-Phe-Arg-Asp-Tyr-Val-Asp-Arg-Phe- Tyr-Lys-Thr-Leu- Arg-Ala-Glu-Gln-Ala-Ser-Gln-Glu-Val-Lys-Asn-Trp-Met-Thr- Glu-Thr-Leu-Leu-Val-Gln-Asn-Ala-Asn-Pro-Asp-Cys-Lys ;

composés des acides aminés 352-361, c.-à-d. Gly-Val-Gly-Gly-Pro-Gly-His-Lys-Ala-Arg ;

b) Peptides de la région env définie comme débutant à l’acide aminé 1 = lysine codé par l’AAA en position 5746-5748 dans la séquence d’ADN de LAV:

composés des acides aminés 466-500, c.-à-d. Leu-Thr-Arg-Asp-Gly-Gly-Asn-Asn-Asn-Asn-Gly-Ser-Glu-Ile- Phe-Arg-Pro- Gly-Gly-Gly-Asp-Met-Arg-Asp-Asn-Trp-Arg-Ser-Glu-Leu- Tyr-Lys-Tyr-Lys-Val ;

composés des acides aminés 510-523, c.-à-d. Pro-Thr-Lys-Ala-Lys-Arg-Arg-Val-Val-Gln-Arg-Glu-Lys-Arg ;

composés des acides aminés 551-577, c.-à-d. Val-Gln-Ala-Arg-Gln-Leu-Leu-Ser-Gly-Ile-Val-Gln-Gln-Gln– Asn-Asn-Leu- Leu-Arg-Ala-Ile-Glu-Ala-Gln-Gln-His-Leu ;

composés des acides aminés 594-603, c.-à-d. Ala-Val-Glu-Arg-Tyr-Leu-Lys-Asp-Gln-Gln ;

composés des acides aminés 621-630, c.-à-d. Pro-Trp-Asn-Ala-Ser-Trp-Ser-Asn-Lys-Ser ;

composés des acides aminés 657-679, c.-à-d. Leu-Ile-Glu-Glu-Ser-Gln-Asn-Gln-Gln-Glu-Lys-Asn-Glu- Gln-Glu-Leu-Leu- Glu-Leu-Asp-Lys-Trp-Ala.”

Ainsi que l’a fait valoir le requérant I dans les motifs de son recours, cette revendication diffère de la revendication 1 du brevet tel que délivré uniquement en ce que tous les peptides cités dans le document (1), à savoir dans la demande WO 86/02383 – qui a une première date de priorité (18 octobre 1984) antérieure au brevet en litige (24 avril 1985), mais qui a été publiée le 24 avril 1986, soit après la date de dépôt de celui-ci (21 avril 1986), et qui est donc comprise dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE -, ont été exclus de la revendication (au moyen d’un “disclaimer”) afin de répondre à une objection d’absence de nouveauté.

V. La procédure orale a eu lieu le 28 mai 2002. Lors de la discussion sur la question de savoir si le “disclaimer” figurant dans la revendication 1 contenait ou non des éléments supplémentaires en violation de l’article 123(2) CBE, l’attention des parties a été attirée sur la décision T 323/97 du 17 septembre 2001 (publiée au JO OEB 2002, 476) concernant la recevabilité des “disclaimers” au regard de l’article 123(2) CBE. Toutes les parties ont alors demandé que la Grande Chambre de recours soit saisie de cette question. Un délai de deux mois leur a été imparti pour faire des propositions.

Toutes les parties ont présenté dans le délai imparti des questions de droit à soumettre à la Grande Chambre de recours.

VI. Le requérant I a demandé que la Grande Chambre de recours soit saisie des questions suivantes :

“Une modification dépourvue de fondement dans la demande telle que déposée qui est apportée à une revendication au moyen d’un disclaimer est-elle recevable au regard de l’article 123(2) CBE lorsqu’elle vise à exclure des éléments divulgués dans un document de l’état de la technique, en particulier tel que défini à l’article 54(3) CBE?

Dans l’affirmative, quels sont les critères applicables pour apprécier la recevabilité des disclaimers ?”

VII. Le requérant II a demandé que la Grande Chambre soit saisie des questions suivantes :

“1a) L’exigence prévue à l’article 123(2) CBE, selon laquelle une demande de brevet européen ou un brevet européen ne peut être modifié de manière que son objet s’étende au-delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée, signifie-t-elle que tout disclaimer doit avoir un fondement dans la demande telle qu’elle a été déposée ?

1b) Ou bien un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande telle que déposée peut-il être introduit dans une revendication afin d’établir la nouveauté par rapport à une antériorisation “fortuite”, sans porter atteinte à l’article 123(2) CBE ?

2. S’il est répondu par l’affirmative à la question 1b), quels sont les critères applicables pour apprécier si le disclaimer se borne ou non à établir la nouveauté, c.-à-d. si la caractéristique négative ajoutée n’apporte aucune contribution technique à l’invention revendiquée ?

3. S’il est répondu par l’affirmative à la question 1b), quels sont les critères applicables pour apprécier si l’antériorisation est réellement fortuite ?

4. S’il est répondu par l’affirmative à la question 1b), un disclaimer est-il recevable lorsqu’il vise à exclure un objet considéré comme compris dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE ?

5. S’il est répondu par l’affirmative à la question 1b), un disclaimer est-il recevable lorsque la nouveauté peut encore être établie par rapport à une antériorité en introduisant une caractéristique positive ?

6. S’il est répondu par l’affirmative à la question 1b), quels autres critères le disclaimer doit-il remplir pour être recevable ?”

VIII. L’opposant 1 a proposé les questions suivantes :

“L’article 123(2) CBE dispose qu’une demande de brevet européen ou un brevet européen ne peut être modifié de manière que son objet s’étende au-delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée.

1. Peut-on admettre, au regard de cette exigence, des disclaimers dépourvus de fondement dans la demande telle que déposée, afin de délimiter l’objet d’un brevet européen ou d’une demande de brevet européen par rapport à un document de l’état de la technique prétendument destructeur de nouveauté, et en particulier par rapport à un document de l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, ainsi que l’affirment par exemple les décisions T 898/91, T 526/92, T 645/95, T 608/96, T 863/96 et T 597/92 (JO OEB 1996, 135) ? Ou bien de tels disclaimers sont-ils au contraire irrecevables au regard de l’article 123(2) CBE, comme l’énonce la décision T 323/97 ?

2. S’il est répondu à la question 1 que de tels disclaimers sont recevables, quels sont les critères applicables pour apprécier la recevabilité d’un disclaimer ?

En particulier, un disclaimer doit-il répondre aux critères suivants ?

a) Le disclaimer doit être précisément défini et limité à la divulgation de l’état de la technique, c.-à-d. qu’il n’est pas permis d’exclure un quelconque enseignement général fondé sur l’interprétation de l’enseignement de cette divulgation.

b) Le document de l’état de la technique prétendument destructeur de nouveauté doit représenter une antériorisation fortuite, ce qui reviendrait à dire qu’un disclaimer n’est admissible que si le document de l’état de la technique qui contient la divulgation exclue ne revêt aucune pertinence par ailleurs pour l’examen de l’invention revendiquée et que ce document doit disparaître de l’état de la technique à prendre en considération une fois que le disclaimer est introduit.

c) Le disclaimer doit être la seule possibilité de délimiter l’objet revendiqué par rapport au document de l’état de la technique prétendument destructeur de nouveauté.

3. Les critères mentionnés aux points 2a), 2b) et 2c) sont-ils également applicables à un disclaimer en rapport avec un état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE ?”

Motifs de la décision

1. La revendication 1 selon la requête principale que la Chambre est appelée à examiner contient ce qu’il est convenu d’appeler un “disclaimer”, qui exclut de l’objet revendiqué treize peptides énumérés dans la revendication. Ces peptides sont divulgués dans le document (1), à savoir un document de l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE (cf. point IV supra). La revendication 1 ne serait pas nouvelle si les peptides exclus par le “disclaimer” étaient maintenus. Cela est conforme à la jurisprudence constante des chambres de recours sur cet aspect particulier de la nouveauté, lorsque l’objet d’une revendication se recoupe avec une antériorité (cf. p. ex. la décision T 124/87, JO OEB 1989, 491). Par conséquent, la question décisive en l’espèce est de savoir si le disclaimer est ou non recevable au regard de l’article 123(2) CBE.

2. Les peptides à utiliser comme réactifs dans la méthode revendiquée (cf. point IV supra) sont définis par le nombre d’acides aminés qu’ils contiennent et par la partie du génome de LAV/HTLV-III dont ils proviennent, du moins partiellement. Ils peuvent donc contenir de 6 à 49 acides aminés, parmi lesquels six doivent provenir de l’une des trois régions comprenant respectivement 93 acides aminés (codés par l’ADN de la paire de base (bp) 450 à bp 731), 170 acides aminés (codés par l’ADN de bp 900 à bp 1421) et 201 acides aminés (codés par l’ADN de bp 7210 à bp 7815). Les six acides aminés doivent également être contigus dans lesdites régions. On constate donc sans peine que la méthode revendiquée peut être réalisée avec une pléthore de peptides. Le “disclaimer” utilisé pour exclure de la revendication les treize peptides déjà divulgués dans le document (1) est le seul moyen commode de formuler la revendication sans avoir à énumérer tous les peptides, hormis les treize peptides susmentionnés, car une telle énumération s’étendrait assurément sur de nombreuses pages, sans pour autant être complète. 3. De l’avis de la Chambre, le disclaimer figurant dans la revendication 1 répond par conséquent à l’exigence de clarté (article 84 CBE), que la jurisprudence des chambres de recours a très tôt considérée comme une condition essentielle de recevabilité des disclaimers (cf. p. ex. décision T 4/80, JO OEB 1982, 149).

4. La revendication 1 telle qu’elle est désormais libellée mentionne deux groupes particuliers de peptides, à savoir, d’une part, ceux qui possèdent les caractéristiques définies en termes génériques, à l’exception de treize peptides et, d’autre part, ces treize peptides qui, bien que possédant également lesdites caractéristiques, ont néanmoins été exclus de la protection au moyen d’un diclaimer. Aucun de ces deux groupes n’est expressément cité dans la demande telle que déposée. On pourrait donc considérer que la revendication n’est pas admissible au regard de l’article 123(2) CBE, dans le droit fil de la jurisprudence constante des chambres de recours sur l’application de l’article 123(2) CBE lorsque la modification apportée à une revendication est une “sélection”, à partir d’une divulgation générale, de modes de réalisation particuliers qui ne sont pas expressément divulgués dans la demande telle que déposée (cf. p. ex. la décision T 288/92 du 18 novembre 1993). Elle serait cependant admissible en vertu de la longue pratique de l’OEB, elle- même fondée sur la jurisprudence constante élaborée par les chambres de recours sur la recevabilité des disclaimers et résumée ci-après.

5. Les chambres de recours ont estimé dans plusieurs décisions qu’un disclaimer introduit dans une revendication était recevable au regard de l’article 123(2) CBE même s’il est dépourvu de fondement explicite dans la demande telle que déposée. Les décisions les plus pertinentes à cet égard sont citées ci-après. Référence est en outre faite aux décisions concernant des disclaimers visant à éviter une objection d’absence de nouveauté au titre de l’article 54(2) CBE, dans la mesure où les principes qui y sont énoncés peuvent également être pertinents pour apprécier la recevabilité de disclaimers visant (comme en l’espèce) à éviter une objection d’absence de nouveauté au titre de l’article 54(3) CBE.

6. Selon les décisions T 433/86 du 11 décembre 1987 et T 170/87 (JO OEB 1989, 441), il est permis, lorsque l’objet revendiqué de manière générale se recoupe avec l’état de la technique, d’exclure de l’invention revendiquée, au moyen d’un disclaimer, un état de la technique particulier, même si les pièces initiales ne paraissent pas conduire concrètement à une telle exclusion. En particulier, la deuxième décision relève que l’enseignement inventif initialement exposé dans la demande telle que déposée ne subit aucun changement du simple fait qu’il a été délimité par rapport à un état de la technique, le disclaimer ayant pour effet de ne retrancher de cet enseignement que la partie que le demandeur, en raison d’une absence de nouveauté, ne peut revendiquer. Elle précise également qu’il existe à cet égard un important besoin dans la pratique. Il ne s’agit en fait que de définir ce qui peut encore être protégé dans l’enseignement inventif initialement exposé. En d’autres termes, il est considéré que la simple délimitation d’une revendication en vue de répondre à un problème de nouveauté ne modifie pas en soi l’enseignement inventif de la demande et qu’elle est donc compatible avec la raison d’être de l’article 123(2) CBE.

7. On peut déduire des décisions citées ci-dessus que pour être recevable, il suffit qu’un disclaimer dépourvu de fondement dans l’exposé initial remplisse les conditions suivantes :

a) Il doit y avoir recoupement entre l’état de la technique et l’objet revendiqué défini en termes génériques.

b) L’état de la technique à exclure au moyen d’un disclaimer doit être “particulier” ou, comme l’a énoncé plus clairement la décision T 433/86 (cf. ci-dessus), spécifique.

c) Le disclaimer est nécessaire pour établir la nouveauté.

8. Si dans la décision T 597/92 (JO OEB 1996, 135), la chambre a pour l’essentiel confirmé les principes susmentionnés, elle a cependant ajouté une exigence supplémentaire, à savoir qu’un disclaimer n’est admis exceptionnellement, pour éviter la destruction de la nouveauté par une antériorité, que lorsqu’il n’est pas possible de restreindre en termes positifs l’objet d’une revendication en se fondant sur la divulgation initiale, sans nuire indûment à la clarté et à la concision de l’exposé. L’exigence de clarté avait en effet déjà été établie par la décision T 4/80 (cf. ci-dessus).

9. La décision T 426/94 du 22 mai 1996 semble mettre en évidence une nouvelle exigence à remplir par un disclaimer visant à répondre à une objection soulevée au titre de l’article 54(2) CBE pour être admissible au regard de l’article 123(2) CBE : l’état de la technique qu’il exclut doit détruire fortuitement la nouveauté. Elle affirme également qu’un disclaimer introduit pour établir la nouveauté doit exclure précisément l’objet divulgué dans l’état de la technique.

10. De l’avis de la Chambre, l’importance de cette décision réside dans l’introduction d’une nouvelle condition auquel un disclaimer doit satisfaire pour être recevable, à savoir que l’état de la technique doit détruire fortuitement la nouveauté, tandis que les décisions citées aux points 6 et 7 ci-dessus se réfèrent à un état de la technique particulier/spécifique. Ce principe, instauré dans le cadre du rétablissement de la nouveauté au regard de l’article 54(2) CBE, pourrait également être pertinent au regard de l’article 54(3) CBE.

11. Le sens du terme “fortuitement” utilisé dans ce contexte à propos de l’état de la technique a été expliqué, entre autres, dans la décision T 608/96 du 11 juillet 2000, selon laquelle une divulgation serait considérée comme détruisant fortuitement la nouveauté (zufällig neuheitsschädliche Offenbarung), si un homme du métier n’en tenait aucun compte lors de l’examen du problème à la base du brevet (ou de la demande de brevet), du fait qu’elle relève d’un domaine technique complètement différent ou qu’elle ne contribue pas à résoudre le problème technique à la base de l’invention revendiquée. Cela signifie également, selon cette décision, qu’une divulgation ne peut être considérée comme détruisant fortuitement la nouveauté que si elle est totalement dénuée de pertinence pour l’appréciation de l’activité inventive.

12. Le principe énoncé au point 9 ci-dessus a été appliqué de manière cohérente dans la décision T 917/94 du 28 octobre 1999, où un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande initiale a été considéré comme irrecevable, au motif que le document de l’état de la technique à l’origine de ce disclaimer concernait le même domaine (et le même problème technique) que l’invention revendiquée. En outre, comme ce document divulguait l’état de la technique le plus pertinent, il aurait dû être pris en considération aux fins de l’appréciation de l’activité inventive. En effet, selon cette décision, un disclaimer ne saurait être admis si son introduction a pour effet de rendre inventif un objet par ailleurs évident. Etant donné qu’il aurait changé la nature de l’invention alléguée, le disclaimer n’était pas conforme aux dispositions de l’article 123(2) CBE.

13. Dans la décision T 596/96 du 14 décembre 1999, la chambre fait également observer que le document de l’état de la technique (sur lequel est fondé le disclaimer) doit incontestablement détruire la nouveauté. Autrement dit, un disclaimer ne saurait être admis à simple titre de précaution ou en tant que moyen complémentaire de clarifier ce qui distingue l’objet revendiqué de l’état de la technique.

14. La recevabilité des disclaimers a fait l’objet d’un exposé précis et complet dans la décision T 934/97 du 6 juin 2001, selon laquelle un disclaimer introduit dans une revendication n’enfreint pas l’article 123(2) CBE et peut donc être admis dès lors que les conditions strictes suivantes sont remplies :

i) Il doit y avoir un état de la technique destructeur de la nouveauté, et le disclaimer doit être précisément formulé sur la base de cet état de la technique et délimiter l’invention par rapport à celui-ci.

ii) Cet état de la technique doit être fortuit.

iii) L’état de la technique exclu ne doit pas faire partie de l’état de la technique à prendre en considération aux fins de l’appréciation de l’activité inventive.

iv) L’introduction du disclaimer doit également remplir la condition Bnoncée dans la décision G 1/93 (JO OEB 1994, 541), point 9 des motifs, selon laquelle il est interdit au demandeur, en vertu de l’article 123(2) CBE, de conforter sa position par l’ajout d’un élément non divulgué dans la demande telle qu’elle a été déposée, ce qui lui procurerait un avantage injustifié et pourrait porter préjudice à la sécurité juridique des tiers se fondant sur le contenu de la demande initiale.

15. Compte tenu tout particulièrement de l’article 54(3) CBE, les disclaimers ont été considérés comme recevables dans, notamment, les décisions T 318/98 du 8 août 2000 et T 1125/97 du 22 février 2001, où le disclaimer était nécessaire pour rétablir la nouveauté par rapport à un document qui n’avait pas encore été publié à la date de dépôt de la demande de brevet. Les deux décisions précitées ne fournissent aucun motif à l’appui de cette affirmation, mais se bornent simplement à faire référence aux principes exposés dans la jurisprudence.

16. Dans l’affaire T 351/98 du 15 janvier 2002, la chambre a motivé sa décision à la lumière de l’avis exprimé dans la décision T 323/97 (cf. infra) sur la recevabilité des disclaimers. Selon elle, lorsqu’il y a recoupement entre un état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE et l’objet revendiqué, l’état de la technique particulier peut être exclu par un disclaimer pour établir la nouveauté, même si l’objet exclu n’a pas de fondement dans la demande telle que déposée. Lorsqu’il s’agit d’un état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, le demandeur ultérieur ne peut pas avoir connaissance de cet état de la technique et n’est donc pas en mesure de formuler ses revendications initiales de façon à l’éviter, si bien qu’une interprétation équilibrée de la CBE justifie semble-t-il d’autoriser le demandeur à introduire un disclaimer afin de limiter ses revendications à ce qui est nouveau par rapport à l’état de la technique défini à l’article 54(3) CBE. Dans une telle situation, où le fait de s’en tenir trop strictement à la présence d’une base précise dans la divulgation initiale aux fins de l’article 123(2) CBE aurait pour effet d’étendre la présomption de publication prévue à l’article 54(3) CBE à des éléments non divulgués dans les demandes antérieures, l’admission d’un disclaimer semble représenter une interprétation plus appropriée de la Convention (NB : il était question, comme en l’espèce, de peptides du VIH).

17. Une solution similaire a été adoptée dans la décision T 664/00 du 28 novembre 2002, dans laquelle l’objet exclu était compris dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE. La chambre a estimé que l’introduction des disclaimers revenait simplement à renoncer à une protection, et non à apporter une contribution technique à l’objet de l’invention revendiquée. Ces disclaimers ont donc été considérés comme recevables. Référence a également été faite aux principes énoncés dans la décision G 1/93 (cf. supra).

18. Plusieurs autres décisions ont pour l’essentiel confirmé les principes exposés ci-dessus, en particulier les décisions T 525/99 en date du 12 septembre 2002, T 339/98 en date du 18 septembre 2001, T 43/99 en date du 29 janvier 2001, T 13/97 en date du 22 novembre 1999, T 863/96 en date du 4 février 1999, T 982/94 en date du 16 septembre 1997, T 653/92 en date du 11 juin 1996, T 434/92 en date du 28 novembre 1995 et T 710/92 en date du 11 octobre 1995.

19. La décision T 323/97 (cf. supra) énonce des principes qui s’écartent expressément de la jurisprudence constante précitée. Selon cette décision, un disclaimer ne peut pas être introduit dans une revendication pour répondre à une objection d’absence de nouveauté dès lors qu’il ne trouve aucun fondement dans la demande telle que déposée. De l’avis de la Chambre, cette constatation pourrait être considérée comme une opinion incidente, dans la mesure où il est clairement expliqué au point 2.1 des motifs qu’aucune objection d’absence de nouveauté à l’encontre de l’objet du brevet litigieux n’était basée ou aurait pu être basée sur les documents de l’état de la technique pris en considération par le disclaimer, puisque leurs enseignements respectifs différaient de celui du brevet en cause, même sans l’ajout d’un disclaimer dans ce dernier. La Chambre considère néanmoins que cette décision soulève une question de droit d’importance fondamentale (article 112(1) CBE) si l’on tient compte, d’une part, de la pratique constante de l’OEB sur la recevabilité de disclaimers introduits dans une revendication en étant dépourvus de fondement dans la demande telle que déposée et, d’autre part, de l’importance des objections élevées à l’encontre de cette pratique dans la décision en question. 20. Cette question de droit est pertinente pour la présente procédure dans la mesure où il y a lieu de statuer sur la recevabilité d’un disclaimer. Dans la décision T 323/97 (cf. supra), la chambre a estimé qu’une modification apportée à un brevet par l’ajout, dans une revendication, d’une caractéristique technique “négative” donnant lieu à l’exclusion de certains modes de réalisation, à savoir l’introduction d’un disclaimer dans la revendication, n’en demeure pas moins, indépendamment du terme “disclaimer”, une modification régie par l’article 123(2) et (3) CBE. Cela signifie, dans la mesure où les exigences de l’article 123(2) CBE sont concernées, que la revendication modifiée doit avoir un fondement dans la demande telle que déposée, cette exigence étant impérative pour que le brevet modifié ou la demande de brevet modifiée soit admissible, comme cela a été exposé dans la décision G 3/89 (JO OEB 1993, 117, point 1.3 des motifs).

21. Il a été constaté dans cette décision qu’il y a également lieu de prendre en considération les principes de sécurité juridique et de cohérence qui, selon la décision G 2/98 (JO OEB 2001, 413), doivent être sauvegardés lors de l’appréciation des droits de priorité, de la nouveauté et de l’activité inventive, lorsqu’il s’agit d’examiner si un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande telle que déposée peut être introduit dans une revendication afin d’établir la nouveauté par rapport à une antériorité prétendument “fortuite”. La décision G 2/98 énonce en particulier que la réponse à la question de savoir si certaines caractéristiques techniques d’une invention sont ou non en rapport avec sa fonction et son effet peut changer au cours de la procédure, notamment lorsqu’il y a lieu de tenir compte de nouvelles antériorités, et que le problème technique résolu par une invention ne peut à tout moment être déterminé une fois pour toutes, mais qu’il se pourrait qu’il doive faire l’objet d’une vaste redéfinition au cours de la procédure, ou même plus tard, à la lumière d’un nouvel état de la technique. Par conséquent, la validité d’un droit de priorité pourrait être remise en question, ce qui serait en contradiction avec le principe de sécurité juridique. De la même manière, s’agissant de la recevabilité des disclaimers, étant donné qu’il ne serait pas possible de déterminer avec certitude si la restriction opérée par la modification, à savoir la caractéristique négative ajoutée, implique ou non une contribution technique à l’invention revendiquée et si l’enseignement destructeur de nouveauté est réellement fortuit ou non, la recevabilité d’un disclaimer n’ayant pas de fondement dans la demande telle que déposée serait en contradiction avec les principes susmentionnés. Ainsi, lorsqu’un mode de réalisation particulier (p. ex. un composé chimique) est exclu par un disclaimer de l’enseignement générique d’une demande de brevet (p. ex. une formule générique) parce qu’il avait été fortuitement divulgué dans un domaine technique tout à fait étranger à celui de la demande, il est possible de découvrir par la suite qu’un autre document cité divulgue des propriétés du mode de réalisation exclu par ce disclaimer à l’intérieur du domaine technique de la demande ou en rapport avec ce domaine. Cela pourrait nécessiter une redéfinition du problème technique à la base de l’enseignement technique envisagé à l’origine, avec toutes les conséquences négatives relevées dans la décision G 2/98 (cf. supra).

22. La décision T 323/97 (cf. supra) souligne également qu’à la lumière de la décision G 1/93 (cf. supra), l’ajout d’un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande initiale ne peut pas être admis au titre de l’article 123(2) CBE. En effet, selon la décision G 1/93, qui traite du conflit possible entre les dispositions des paragraphes 2 et 3 de l’article 123 CBE suite à l’introduction d’une modification inadmissible durant la procédure d’examen, un tel ajout peut être admis s’il ne fait qu’exclure de la protection une partie de l’invention couverte par la demande telle que déposée et qu’il n’apporte pas de contribution technique à l’objet revendiqué.

23. La chambre a donc conclu dans la décision T 323/97 (cf. supra) que toute modification apportée à une revendication au moyen d’un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande telle que déposée et visant à différencier davantage l’objet revendiqué de l’état de la technique est contraire à l’article 123(2) CBE et qu’elle est donc irrecevable.

24. Par conséquent, si l’on suit la décision T 323/97 (cf. supra), le disclaimer figurant dans la revendication 1 en cause ne serait pas admissible en l’espèce, car, ainsi qu’il a déjà été observé au point 4 ci-dessus, la demande telle que déposée ne mentionne pas spécifiquement les deux groupes de peptides, à savoir les treize peptides du document (1), qui sont désormais exclus par le disclaimer, et les autres peptides compris dans la définition générique de la classe de peptides.

25. L’analyse effectuée ci-dessus de la jurisprudence des chambres de recours et des différentes solutions qui ont été adoptées montre qu’il est nécessaire de saisir la Grande Chambre de recours conformément à l’article 112(1) CBE. La question soumise à la Grande Chambre (telle qu’elle est libellée dans le dispositif) a été formulée, d’une part, à la lumière des propositions émises par les parties à la procédure (cf. points VI à VIII supra) et, d’autre part, en tenant compte de ce fait que la présente affaire porte uniquement sur des disclaimers introduits en vue de répondre à des objections d’absence de nouveauté au regard de l’article 54(3) CBE.

26. Selon la Chambre, les points suivants peuvent être pris en considération aux fins de l’examen des problèmes concernant la recevabilité des disclaimers au regard de l’article 123(2) CBE :

i) Parmi tous les sens que le terme “disclaimer” est susceptible de revêtir, le seul à prendre en considération est celui indiqué dans la décision T 323/97 (supra), selon laquelle un disclaimer est une modification apportée une revendication existante qui a pour effet d’introduire dans la revendication une caractéristique technique “négative”. A l’instar de toutes les modifications, les disclaimers sont régis par l’article 123(2) CBE.

ii) Aux fins de l’appréciation de la recevabilité d’un disclaimer, les principes énoncés dans la décision G 1/93 (cf. supra) peuvent être pris en considération (point 16 des motifs). L’article 123(2) CBE visant à empêcher un demandeur de s’assurer un avantage injustifié en obtenant une protection par brevet pour quelque chose qu’il n’a pas dûment divulgué et peut-être pas même inventé à la date de dépôt de la demande, une caractéristique ajoutée ne doit pas être considérée comme un élément étendant l’objet de la demande telle qu’elle a été déposée au sens de cette disposition si elle ne fait qu’exclure de la protection une partie de l’objet de l’invention revendiquée par la demande telle que déposée sans y apporter de contribution technique. En effet, on ne saurait raisonnablement considérer que l’ajout d’une caractéristique qui satisfait à ces exigences procure un avantage injustifié au demandeur ou qu’il affecte les intérêts des tiers. La question de savoir si ces principes sont applicables, par analogie, à la recevabilité d’un disclaimer présentant les caractéristiques précitées pourrait être jugée pertinente par la Grande Chambre de recours aux fins de la décision qu’elle est appelée à rendre sur les questions qui lui sont soumises.

iii) Si la Grande Chambre de recours devait confirmer la décision T 323/97 (cf. supra), il en résulterait que des revendications qui comprennent un disclaimer, conformément à la jurisprudence antérieure, dans des brevets délivrés ne seraient plus valables au regard de l’article 123(2) CBE. Il ne serait pas possible d’y remédier en se bornant à supprimer les disclaimers (à supposer que l’on puisse répondre par un autre moyen à l’objection d’absence de nouveauté qui a été à l’origine de l’introduction d’un disclaimer), sans se retrouver dans ce qu’il est convenu d’appeler une “embûche inextricable” (cf. décision G 1/93 supra), dans la mesure où, par nature, un disclaimer réduit la portée d’une revendication et où son retrait aurait inévitablement pour conséquence d’étendre la protection après la délivrance, en violation de l’article 123(3) CBE.

iv) S’agissant de l’article 54(3) CBE, il convient de tenir compte de la situation particulière du demandeur. Ainsi que l’a énoncé clairement la décision T 351/98 (cf. supra), le demandeur ne peut pas avoir connaissance de l’état de la technique potentiellement destructeur de nouveauté qui est contenu dans une demande antérieure publiée seulement après le dépôt de sa propre demande. Il n’est donc pas en mesure de formuler sa demande de façon à éviter tout recoupement avec un tel état de la technique. Le fait que l’article 54(3) CBE vise à empêcher la double protection par brevet (cf. par exemple Singer/Stauder, Europäisches Patentübereinkommen, 2e édition, article 54, numéro 90) pourrait donner à penser qu’il convient d’interpréter l’article 123(2) CBE conformément à la décision G 1/93 (cf. point 26ii) supra). Une modification apportée au moyen d’un disclaimer reviendrait en ce cas uniquement à renoncer à protéger un objet déjà divulgué dans un document de l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE.

v) Les réponses que la Grande Chambre de recours apportera aux questions qui lui sont soumises dans la présente décision auront une incidence considérable sur un grand nombre de brevets déjà délivrés, dans la mesure où l’utilisation de disclaimers est une pratique courante à l’OEB en vertu de sa jurisprudence constante.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Les questions suivantes sont soumises à la Grande Chambre de recours:

Un disclaimer dépourvu de fondement dans la demande telle que déposée est-il recevable et la revendication dans laquelle il est introduit est-elle par conséquent admissible au regard de larticle 123(2) CBE lorsque le disclaimer vise à répondre à une objection d’absence de nouveauté au titre de l’article 54(3) CBE ?

Dans l’affirmative, quels sont les critères applicables pour apprécier la recevabilité du disclaimer ?