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G 0003/99 (Recevabilité-opposition/recours coinjoint ou d’un recours … of 18.2.2002

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2002:G000399.20020218
Date de la décision : 18 Fevrier 2002
Numéro de l’affaire : G 0003/99
Décision de saisin : T 0272/95
Numéro de la demande : 83307553.4
Classe de la CIB : C12N 15/16
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande :
Nom du demandeur : Howard Florey Institute
Nom de l’opposant : Aglietta
Amendola et al.
Paul Lannoye
Chambre : EBA
Sommaire : I. Une opposition formée conjointement par deux personnes ou plus et qui répond par ailleurs aux exigences de l’article 99 CBE ainsi que des règles 1 et 55 CBE est recevable sur paiement d’une seule taxe d’opposition.
II. Lorsque la partie qui fait opposition est constituée de plusieurs personnes, c’est le représentant commun désigné conformément à la règle 100 CBE qui doit introduire le recours. Si le recours est formé par une personne non habilitée, la chambre considérera qu’il n’est pas dûment signé et invitera par conséquent le représentant commun à le signer dans un délai donné. La personne non habilitée qui a formé le recours doit être informée de cette invitation. Si l’ancien représentant commun ne participe plus à la procédure, un nouveau représentant commun doit être désigné conformément à la règle 100 CBE.
III. Afin de sauvegarder les droits du titulaire du brevet et dans l’intérêt de l’efficacité de la procédure, l’on doit savoir clairement pendant toute la procédure qui fait partie du groupe des co-opposants ou des co-requérants. Si l’un des co-opposants ou des co-requérants (y compris le représentant commun) a l’intention de se retirer de la procédure, l’OEB doit en être informé par le représentant commun ou par un nouveau représentant commun désigné conformément à la règle 100(1) CBE pour que ce retrait prenne effet.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 58
European Patent Convention 1973 Art 99
European Patent Convention 1973 Art 99(1)
European Patent Convention 1973 Art 104
European Patent Convention 1973 Art 107
European Patent Convention 1973 Art 110(1)
European Patent Convention 1973 Art 112(1)(a)
European Patent Convention 1973 Art 133
European Patent Convention 1973 Art 133(4)
European Patent Convention 1973 Art 134
European Patent Convention 1973 R 1
European Patent Convention 1973 R 26(2)(c)
European Patent Convention 1973 R 36(3)
European Patent Convention 1973 R 55
European Patent Convention 1973 R 55(a)
European Patent Convention 1973 R 56(2)
European Patent Convention 1973 R 60(2)
European Patent Convention 1973 R 66(1)
European Patent Convention 1973 R 100
European Patent Convention 1973 R 100(1)
Mot-clé : Recevabilité – Taxe d’opposition – personnes agissant conjointement pour former une opposition – opposition conjointe
Recevabilité – Taxe de recours – personnes agissant conjointement pour former un recours – recours conjoint
Représentant commun
Exergue :

Décisions citées :
G 0008/92
G 0003/97
G 0004/97
T 0025/85
T 0635/88
T 0665/89
T 0543/99
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0002/04
G 0001/12
G 0001/13
J 0002/01
J 0019/13
R 0018/09
T 0272/95
T 0867/96
T 1018/98
T 0668/99
T 0074/00
T 1048/00
T 0228/01
T 0416/01
T 0553/01
T 0866/01
T 0983/01
T 0482/02
T 0315/03
T 0382/03
T 1165/03
T 1190/03
T 0991/04
T 1178/04
T 0004/05
T 0477/05
T 0480/05
T 1324/05
T 1035/06
T 1154/06
T 0755/09
T 1486/10
T 0854/12
T 0979/12
T 0562/13
T 1426/13
T 1654/13
T 2005/13
T 0205/14
T 0517/14
T 1954/14

Exposé des faits et conclusions

I. Dans sa décision T 272/95 en date du 15 avril 1999 (JO OEB 1999, 590), la chambre de recours technique 3.3.4 a soumis à la Grande Chambre de recours les questions suivantes, conformément à l’article 112(1)a) CBE :

1) Une opposition qui répond aux exigences de l’article 99 CBE et de la règle 55 CBE est-elle recevable si elle a été formée conjointement par deux personnes ou plus et qu’une seule taxe d’opposition a été acquittée ?

2) S’il est répondu par l’affirmative à la question 1 et qu’un représentant commun a été désigné conformément à la règle 100(1) CBE dans l’acte d’opposition, un recours est-il valable même s’il n’a pas été formé par cette personne ?

3) S’il est répondu par l’affirmative aux questions 1 et 2, quelles sont, le cas échéant, les autres exigences auxquelles une opposition conjointe ou un recours conjoint doivent répondre afin de sauvegarder les droits du titulaire du brevet ?

II. Dans sa décision de saisine, la chambre a déclaré qu’il était nécessaire de répondre à ces questions pour pouvoir statuer sur les objections soulevées par l’intimé quant à la recevabilité de l’opposition et du recours qui lui a fait suite (T 272/95).

III. Les faits qui ont conduit à la présente saisine peuvent se résumer comme suit :

1) S’agissant de l’opposition

a) Le 10 janvier 1992, un mandataire agréé au sens de l’article 134 CBE a formé dans la même lettre deux oppositions distinctes et acquitté deux taxes d’opposition. Il a déclaré qu’il n’était pas sûr que la première opposition fût recevable au regard de l’article 99(1) CBE. L’opposition en question avait en effet été formée “Namens und im Auftrag der Fraktion der Grünen im Europäischen Parlament [ci-après “Fraktion der Grünen”], nämlich der Abgeordneten …”, cette mention étant suivie d’une liste de 26 membres du Parlement européen nommément cités. Mme Aglietta était la première personne figurant sur cette liste, et M. Paul Lannoye, président de la “Fraktion der Grünen”, y était désigné comme représentant commun (soit au total un groupe de 27 personnes physiques). C’est pourquoi le mandataire agréé a simultanément formé une deuxième opposition au nom de M. Paul Lannoye uniquement, en expliquant que les deux oppositions seraient conduites de la même manière.

b) Le 11 novembre 1992, l’agent des formalités a envoyé une notification dans laquelle il a fait observer :

– qu’il était douteux que le groupe “Fraktion der Grünen” puisse être considéré comme une personne morale ou une société assimilée à une personne morale ;

– que la première opposition pouvait néanmoins être considérée comme ayant été formée par plusieurs personnes individuelles agissant conjointement conformément à la règle 100(1), dernière phrase CBE, à condition que le mandataire agréé fût autorisé à représenter chacune de ces personnes ;

– que la deuxième opposition ne soulevait en soi aucun problème. Toutefois, si la première opposition devait être considérée comme une “opposition conjointe”, le président de la “Fraktion der Grünen” ne pouvait être qu’une fois partie à la même procédure.

Le mandataire agréé a été invité à préciser si le président de la “Fraktion der Grünen” maintenait son opposition, auquel cas il serait radié de la liste des opposants agissant conjointement, afin de bien établir que deux oppositions distinctes avaient été formées, tout en conservant la possibilité d’être représenté par le même mandataire agréé et d’agir de concert avec les co-opposants, ou bien s’il préférait prendre part à “l’opposition conjointe” et donc agir avec les autres co-opposants, auquel cas son opposition individuelle serait superflue et donc rejetée.

La notification précisait également que, quel que soit le cours que prendrait la procédure, il n’y avait aucune raison de rembourser l’une des taxes d’opposition qui avaient été acquittées.

c) Le 21 janvier 1993, le mandataire agréé a répondu en marquant sa préférence pour la première variante. Il a donc décidé de maintenir deux oppositions distinctes : la première (ci-après “opposition 1”) étant l’opposition formée conjointement par les membres de la “Fraktion der Grünen” tels qu’ils étaient nommément cités dans l’acte d’opposition, mais sans M. Lannoye, président de la “Fraktion der Grünen”, soit 26 personnes en tout (ci-après “co-opposants 1”), et la deuxième (ci-après “opposition 2”) étant celle formée au nom du président de la “Fraktion der Grünen” (ci-après “opposant 2”).

d) Le 3 mai 1993, le mandataire agréé a déposé deux pouvoirs, un pour chaque opposition. Le premier pouvoir l’autorisait à représenter 18 personnes parmi les 26 agissant conjointement dans l’opposition 1. L’une des personnes à avoir signé ce pouvoir était Mme Aglietta, c’est-à-dire la première personne inscrite sur la liste des co-opposants, tandis que le deuxième pouvoir autorisait le mandataire à représenter M. Lannoye, président de la “Fraktion der Grünen”, dans l’opposition 2 formée au nom de ce dernier.

e) Dans son mémoire en date du 10 novembre 1993, le titulaire du brevet s’est limité à faire valoir à propos de la recevabilité des deux oppositions que si l’opposition du groupe devait être formée pour le compte d’un groupe de personnes, cela aurait dû être fait initialement dans le délai d’opposition.

f) Dans la décision qu’elle a prononcée à l’issue de la procédure orale du 8 décembre 1994, la division d’opposition a conclu que les deux oppositions étaient recevables car elles remplissaient toutes les conditions de l’article 99(1) CBE et de la règle 55 CBE. S’agissant de l’opposition 1, elle a déclaré que les noms des membres de la “Fraktion der Grünen” étant énumérés dans l’acte d’opposition, il n’y avait aucune objection à ce que cette opposition soit considérée comme ayant été formée conjointement par le groupe de personnes citées dans l’acte d’opposition. Elle a estimé qu’il importait peu que les personnes citées soient ou non encore toutes membres de la “Fraktion der Grünen” et que cette question n’avait en pratique aucune importance, puisqu’il n’y avait aucun doute sur la recevabilité de l’opposition formée par M. Lannoye, président de la “Fraktion”, à savoir l’opposition 2. L’opposition a été rejetée pour des motifs liés au fond de l’affaire.

g) Dans une lettre en date du 12 décembre 1994, reçue à l’OEB le 14 décembre, c’est-à-dire après le prononcé de la décision de la division d’opposition à l’issue de la procédure orale du 8 décembre, mais avant l’envoi aux parties le 18 janvier 1995 des motifs écrits de cette décision, le mandataire agréé a annoncé qu’il renonçait à son pouvoir pour l’opposition 1 et que toute la correspondance devait à l’avenir être adressée aux “Greens in the European Parliament for the attention of Mrs Linda Bullard”.

2) S’agissant du recours

a) Par télécopie reçue à l’OEB le 28 mars 1995, Mme L. Bullard a formé un recours, qu’elle a elle-même signé, contre la décision de la division d’opposition, et ce pour le compte de cinq membres du Parlement européen, lesquels figuraient tous sur la liste des opposants ayant agi conjointement dans la procédure d’opposition. La première personne citée sur cette liste de cinq personnes était Mme Aglietta, qui était également la première personne inscrite sur la liste des co-opposants. Mme L. Bullard a reconnu que la décision motivée de la division d’opposition avait été signifiée à “Aglietta, Amendola et. al., Fraktion der Grünen”, et a fait savoir que l’OEB serait informé en temps utile de la situation concernant la représentation. La première personne citée dans l’acte de recours en tant que co-requérant était la même que celle citée en premier lieu dans l’acte d’opposition en tant que co-opposant, à savoir Mme Aglietta.

b) Dans une notification établie le 4 avril 1995 au titre de la règle 36(3) CBE, le requérant a été informé par un agent des formalités de la Direction générale 2 de l’OEB que l’acte de recours avait été signé par une personne non habilitée, et il a été invité à produire dans un délai de deux mois un exemplaire de l’acte dûment signé par une personne habilitée, faute de quoi la pièce en question serait réputée non reçue.

c) Par lettre en date du 12 avril 1995, reçue par l’OEB le 22 avril, Mme L. Bullard a envoyé un pouvoir daté du 28 mars 1995 et signé par les cinq personnes, citées dans l’acte de recours, qui l’autorisaient à agir en leur nom jusqu’à ce qu’un mandataire soit constitué.

d) Le 3 mai 1995, la chambre 3.3.4 a envoyé une notification dans laquelle elle évoquait la validité de la formation du recours et demandait quelle était l’identité du requérant, car l’acte de recours n’avait été signé ni par l’un des requérants qui y étaient cités, ni apparemment par une personne habilitée à agir conformément aux dispositions de l’article 134 CBE.

e) Par télécopie reçue à l’OEB le 26 mai 1995, un nouveau mandataire agréé a été constitué sur un formulaire en date du 24 mai 1995 par les cinq personnes citées dans l’acte de recours. Aucun mandataire n’a été constitué par la “Fraktion der Grünen” en tant que telle.

f) Dans une réponse à la notification du 3 mai 1995, reçue par l’OEB le 13 juillet 1995, le nouveau mandataire agréé a déclaré que les requérants étaient le groupe initial des co-opposants, à l’exception de l’un d’eux qui était décédé entre-temps (il s’agissait d’ailleurs de l’une des cinq personnes citées dans l’acte de recours et il avait signé avant son décès le pouvoir octroyé à Mme L. Bullard, puis au nouveau mandataire). Cette réponse était accompagnée des pièces suivantes :

– des copies de l’acte de recours reçu par l’OEB le 28 mars 1995, contre-signées par toutes ces personnes, y compris Mme Aglietta, à savoir la première personne citée sur la liste des co-opposants ;

– des pouvoirs pour le nouveau mandataire signés par chacune de ces personnes, y compris Mme Aglietta, certains étant datés du 24 avril 1995, du 22 et du 30 juin 1995, d’autres n’étant pas datés ;

– une lettre de l’opposant 2 en date du 10 juillet 1995, par laquelle celui-ci informait l’OEB de son intention de rester partie de droit à la procédure de recours conformément à l’article 107 CBE et d’assurer lui-même sa représentation.

g) Comme indiqué aux points I et II supra, la chambre de recours technique 3.3.4 a décidé de saisir la Grande Chambre de recours.

IV. Les faits de la présente saisine peuvent se résumer comme suit :

1) Par télécopie reçue à l’OEB le 20 septembre 1999, le mandataire du titulaire du brevet a formulé les observations suivantes sur les questions soumises à la Grande Chambre :

– s’agissant de la question 1, il a déclaré que si l’opposition 1 doit être considérée comme recevable, l’opposition et tout éventuel recours ultérieur peuvent être conduits uniquement pour le compte des opposants agissant conjointement, tels qu’ils étaient initialement cités ;

– s’agissant de la question 2, il a fait observer que lorsqu’une seule taxe est acquittée dans le cas d’une “opposition conjointe”, les droits de l’opposant appartiennent au groupe dans son ensemble et non à l’un de ses membres ; il n’y a selon lui aucune raison juridique (à moins qu’il y ait eu transfert de droits) qui justifierait la formation d’un recours par une personne autre que le représentant commun conformément à la règle 100 CBE ;

– s’agissant de la question 3, il a estimé que le groupe des co-opposants doit rester le même au stade du recours, et que lorsque l’un des membres du groupe se retire ou n’a plus d’intérêt à agir, il s’ensuit obligatoirement que le groupe dans son ensemble se retire ou n’a plus d’intérêt.

2) Le 14 avril 2000, une première notification a été envoyée à toutes les personnes concernées dont le nom figurait au dossier, afin de leur permettre de formuler leurs observations sur les questions de droit soulevées, et ce sans préjudice de toute décision finale que pourrait rendre la Grande Chambre de recours sur le statut de ces personnes dans la procédure d’opposition ou de recours, ni de la question de savoir si des personnes différentes ayant formé une opposition conjointe peuvent agir à titre individuel.

3) Dans une deuxième notification en date du 28 août 2001, ces personnes ont été invitées à prendre position, avant le 9 novembre 2001, sur l’avis provisoire émis par la Grande Chambre de recours.

4) Seul le titulaire du brevet a répondu, en déclarant qu’il n’avait pas d’observations à formuler sur la notification.

5) Il n’a pas été requis de procédure orale devant la Grande Chambre de recours.

Motifs de la décision

Recevabilité de la saisine

1. Les questions de droit à trancher ont été soumises à la Grande Chambre de recours conformément à l’article 112(1)a) CBE.

2. La chambre 3.3.4 a déclaré à juste titre que la recevabilité de l’opposition et du recours qui lui fait suite est fonction des réponses qui seront apportées aux questions soumises et a expliqué pour quelles raisons ces questions de droit revêtent une importance fondamentale (cf. points 1 et 2 des motifs de la décision).

3. Bien que l’expression “opposition conjointe” ne soit pas explicitement mentionnée dans la CBE, elle correspond exactement à la situation régie par la règle 100(1), dernière phrase CBE qui porte sur “les tiers intervenant conjointement pour former une opposition”, le terme “tiers” désignant simplement une pluralité de personnes. Dans la présente décision, ces personnes sont appelées “co-opposants” et celles qui ont formé conjointement le recours “co-requérants”, tandis que l’expression générique “personnes agissant en commun” désigne indistinctement les co-opposants ou les co-requérants. Il arrive fréquemment dans les affaires traitées devant la division d’opposition que des oppositions soient formées conjointement et qu’une seule taxe d’opposition soit acquittée. Tel a été le cas non seulement pour l’affaire “Souris oncogène”, citée dans la décision de saisine (cette opposition concernant la demande n 85 304 440.7 et non la demande n 85 030 449.0), mais également pour plusieurs oppositions formées conjointement depuis de nombreuses années, par exemple par Unilever PLC et Unilever NV qui, malgré la ressemblance de leurs noms, sont deux personnes morales différentes. Ces oppositions ont été jugées recevables sur la base de la règle 100(1) CBE. Toutefois, dans la décision T 543/99 (non publiée au JO OEB), la chambre a considéré que ces deux sociétés, à savoir Unilever PLC et Unilever NV, étaient des sociétés “apparentées” et qu’elles auraient dû acquitter chacune une taxe d’opposition lorsqu’elles ont formé opposition. Il ressort donc de ce qui précède qu’une clarification s’impose en ce qui concerne cette question de droit.

4. Ainsi que l’a déjà énoncé la Grande Chambre de recours dans sa décision G 8/92 (non publiée au JO OEB), même si le recours doit en principe être recevable pour que la saisine soit recevable, cela ne s’applique pas lorsque la saisine porte en soi sur la recevabilité du recours. Sans cette exception, les chambres seraient en effet privées, dans des cas tels que le cas présent, de la possibilité de soumettre à la Grande Chambre de recours des questions de droit d’importance fondamentale concernant la recevabilité d’un recours. Cela serait contraire à l’article 112(1)a) CBE, lequel ne prévoit aucune restriction de ce type.

5. La saisine est dès lors recevable.

Recevabilité d’une opposition formée conjointement par deux personnes ou plus lorsqu’une seule taxe d’opposition est acquittée

6. Même si deux oppositions distinctes ont été simultanément formées dans l’acte d’opposition, il ressort clairement des déclarations faites à cette époque par le mandataire agréé que son intention était sans ambiguïté de s’assurer qu’au moins une opposition soit valable. Tout en soulignant que les deux oppositions seraient conduites de manière identique, il a expliqué que la formation de deux oppositions distinctes et le paiement de deux taxes d’opposition avaient pour seul but de garantir qu’au moins une opposition soit recevable.

7. La recevabilité de la deuxième opposition (opposition 2) n’a jamais été sérieusement remise en question, dans la mesure où elle remplissait manifestement toutes les conditions de la CBE. Par conséquent, pour ce qui est de l’existence d’une procédure d’opposition valable, la recevabilité de l’opposition 1 semble à première vue être sans conséquence. Or, seul l’opposant 1 a formé un recours contre la décision de la division d’opposition, si bien que la recevabilité de l’unique recours qui a été formé dépend de la recevabilité de l’opposition 1.

8. Comme l’a fait observer à juste titre l’agent des formalités dans la notification du 11 novembre 1992, on peut se demander à propos de l’opposition 1 comment il convient d’interpréter la mention suivante figurant dans l’acte d’opposition : “Namens und im Auftrag der Fraktion der Grünen …, nämlich der Abgeordneten …”. Signifie-t-elle que l’opposition 1 a été formée par un mandataire agréé au sens des articles 133 et 134 CBE pour le compte de la “Fraktion der Grünen”, à savoir d’une personne morale ou d’une société assimilée à une personne morale, auquel cas l’opposition 1 doit être considérée comme ayant été formée par un seul opposant, la “Fraktion der Grünen”, représenté par un mandataire agréé ? Ou bien faut-il comprendre que l’opposition a été formée pour le compte de personnes physiques nommément citées dans l’acte d’opposition, auquel cas l’opposition 1 doit être considérée comme une opposition formée conjointement conformément à la règle 100(1) CBE par les personnes physiques nommément citées et représentées par un représentant commun désigné conformément à la règle 100(1) CBE ?

9. L’article 99 CBE confère à toute personne le droit de faire opposition. Plusieurs décisions des chambres de recours traitent de l’interprétation qu’il convient de donner à l’expression “toute personne”. Ainsi, dans la décision T 635/88, JO OEB 1993, 608, point 2 des motifs, la chambre a dit clairement que les termes “toute personne” employés à l’article 99 CBE doivent être interprétés, conformément à l’article 58 CBE, comme signifiant a) toute personne physique ou b) toute personne morale ou c) tout organisme assimilé à une personne morale en vertu du droit dont il relève. La personnalité juridique d’une entité donnée selon la CBE est appréciée sur la base des mêmes critères que devant les juridictions nationales, à savoir la capacité d’ester en justice ou d’être poursuivi en justice en son nom et pour son propre compte. Le fait que l’expression “toute personne” doit être interprétée conformément à l’article 58 CBE découle en particulier de la règle 55a) CBE, laquelle fait directement référence à la règle 26(2)c)CBE qui énumère les mêmes entités. Par conséquent, lorsqu’une opposition est formée conjointement par plusieurs personnes, chacun des opposants doit être soit une personne physique, soit une personne morale, soit une société assimilée à une personne morale en vertu du droit dont elle relève, étant entendu qu’une telle opposition peut être formée par plusieurs de ces personnes agissant en commun.

10. Il découle de la règle 100(1) CBE que plusieurs personnes intervenant conjointement pour faire opposition ne forment qu’une seule opposition, et de l’article 99(1), dernière phrase CBE qu’il y a lieu d’acquitter une seule taxe d’opposition dans le délai prévu pour que l’opposition soit réputée formée. Le paiement de la taxe d’opposition est lié à la formation d’une opposition et non au nombre de personnes qui la forment. Bien qu’elle soit formée par plus d’une personne, il n’en demeure pas moins qu’une opposition conjointe constitue une seule opposition, à l’instar d’une opposition formée par une seule personne. Par conséquent, lorsqu’une opposition est formée conjointement, les co-opposants sont tenus d’agir ensemble par l’intermédiaire de leur représentant commun dûment désigné. Du point de vue de la procédure, il n’y a aucune différence par rapport à une opposition formée par une seule personne physique, une seule personne morale ou une seule société assimilée à une personne morale en vertu du droit dont elle relève. Ils doivent en effet remplir les mêmes conditions et acquitter une seule taxe d’opposition. Il n’y a aucune incertitude sur ce point car l’article 99(1), dernière phrase CBE dispose clairement qu’une seule taxe d’opposition est due pour une opposition donnée.

11. Lorsque, comme en l’espèce, on ne sait pas si l’opposition a été formée pour le compte d’une entité dotée de la personnalité juridique ou de plusieurs personnes physiques agissant conjointement, la division d’opposition doit inviter les opposants à prouver que l’entité en question est une personne morale ou assimilée, faute de quoi il sera considéré que l’opposition a été formée pour le compte de plusieurs personnes physiques agissant conjointement.

12. D’après la jurisprudence des chambres de recours (cf. T 25/85, JO OEB 1986, 81, point 6 des motifs ; G 3/97 et G 4/97, JO OEB 1999, 245, 270, point 2.1 des motifs), l’opposant doit être identifié avant l’expiration du délai d’opposition, sous réserve qu’il soit remédié à toute irrégularité conformément à la règle 56(2) CBE. Par conséquent, une personne qui n’a pas été initialement citée en tant que co-opposant ne saurait ultérieurement prendre part à la procédure d’opposition ou à la procédure de recours qui lui fait suite.

13. Il se peut qu’au cours de l’opposition, l’un des co-opposants (ou plusieurs d’entre eux) décide de se retirer de la procédure. Conformément à la règle 60(2), première phrase CBE, la procédure d’opposition peut être poursuivie d’office par l’OEB si l’opposant décède ou devient incapable. La Grande Chambre de recours estime qu’il est également justifié de poursuivre la procédure d’opposition lorsque l’un des co-opposants (ou plusieurs d’entre eux) décide de se retirer de la procédure d’opposition, dans la mesure où un seul co-opposant autre que le représentant commun pourrait sinon mettre fin de son propre chef à l’opposition. Les autres co-opposants restent parties à la procédure (cf. point 15 infra, deuxième phrase).

14. Lorsqu’une opposition est formée conjointement, un représentant commun doit toujours être désigné (article 133(4) et règle 100 CBE) et seul ce représentant commun est habilité à agir dans la procédure d’opposition pour l’ensemble des co-opposants considérés comme un tout. Un co-opposant autre que le représentant commun ou un sous-groupe du groupe ayant formé conjointement l’opposition, mais sans le représentant commun, n’est donc pas autorisé à agir ou à intervenir seul ou au nom de l’un ou plusieurs d’entre eux (cf. cependant point 20). Par conséquent, seul le représentant commun est habilité à signer les pièces produites (règles 100 CBE et 36(3) CBE), la signature des autres personnes n’étant pas requise.

15. S’agissant de la procédure devant la division d’opposition, il y a lieu de traiter une opposition formée conjointement comme une opposition formée par une seule partie, et tous les actes de procédure effectués par la division d’opposition au cours de la procédure relative à l’opposition conjointe s’appliquent conjointement à chacun des co-opposants. Le groupe des co-opposants doit être considéré comme un tout, c’est-à-dire comme une seule partie représentée par un représentant commun. Seul le représentant commun peut accomplir des actes pour le compte du groupe des co-opposants. Toutefois, lorsque l’un d’eux (ou plusieurs d’entre eux) a l’intention de se retirer de la procédure pour une raison ou une autre, le représentant commun doit, dans l’intérêt de l’efficacité de la procédure, en informer en temps voulu l’OEB et les autres parties. Il doit bien préciser dans cette communication que la ou les personnes en question cessent de faire partie du groupe des co-opposants et qu’elles ne peuvent donc plus prendre part à la procédure, sous réserve d’une éventuelle décision prise au titre de l’article 104 CBE.

Recevabilité d’un recours formé par une personne autre que le représentant commun désigné conformément à la règle 100(1) CBE

16. La question 2 porte sur la validité d’un recours formé par une personne qui n’est pas le représentant commun cité dans l’acte d’opposition conformément à la règle 100(1) CBE. La Grande Chambre de recours estime à cet égard qu’il y a lieu d’apprécier la recevabilité d’un recours sur la base des faits tels qu’ils se présentaient au moment où le recours a été formé.

17. Les dispositions de la CBE relatives à la recevabilité d’un recours nécessitent une clarification s’agissant des personnes ayant formé conjointement une opposition. Ainsi qu’il a été observé supra, ces personnes doivent agir conjointement durant toute la procédure par l’intermédiaire de leur représentant commun dûment désigné. Par conséquent, lorsque des co-opposants ont l’intention de former un recours, ils ne peuvent le faire que conjointement avec tous les autres opposants par l’intermédiaire de leur représentant commun dûment désigné. Pour les mêmes raisons que dans le cas d’une opposition conjointe, les chambres doivent traiter un recours formé conjointement comme un recours unique formé par une seule partie, de sorte qu’il y a lieu d’acquitter une seule taxe de recours.

18. Comme pour tous les recours, un recours introduit conjointement par plusieurs personnes doit être formé par une personne habilitée. La règle 100(1) CBE et les articles 133 et 134 CBE déterminent qui est habilité à agir devant la division d’opposition, et la règle 66(1) CBE prévoit que ces dispositions s’appliquent à la procédure devant la chambre de recours. Par conséquent, seul le groupe existant des co-opposants dans son ensemble et représenté par leur représentant commun peut en principe former un recours conjoint (cf. point 14 supra). Ainsi que le veut la pratique devant les instances de l’OEB, la chambre de recours, qui est la seule instance compétente pour examiner au nom de qui le recours a été formé et si le pouvoir de la personne qui a formé le recours est valable, doit envoyer au représentant commun qui a agi dans la procédure d’opposition, une notification dans laquelle elle lui donne la possibilité de remplir les conditions de la CBE dans un délai qu’elle lui impartit, et elle doit en informer la ou les personnes qui ont signé l’acte de recours, si celui-ci n’a pas été signé par le représentant commun. Si le représentant commun désigné conformément à la règle 100(1) CBE ne remédie pas aux irrégularités dans le délai imparti, le recours sera réputé non formé. Il est vrai que l’agent des formalités agissant pour la division d’opposition peut signaler aux parties à la procédure d’opposition qu’une signature fait défaut ou n’est pas valable. Toutefois, il n’est pas compétent pour émettre une notification au titre de la règle 36(3) CBE, dans la mesure où la recevabilité du recours est en jeu (article 110(1) CBE).

19. Ainsi que la Grande Chambre l’a fait observer aux points 12 et 15 supra, il se peut qu’au cours de la procédure relative à l’opposition conjointe, l’un des co-opposants (ou plusieurs d’entre eux) ait l’intention de se retirer de la procédure pour une raison ou une autre. Cela peut également se produire à n’importe quel stade de la procédure qui suit, par exemple lors de la formation du recours ou durant la procédure de recours. Afin de déterminer quelles sont les personnes qui continuent à agir conjointement dans le cours ultérieur de la procédure et celles qui cessent de faire partie du groupe, le représentant commun doit en informer en temps utile l’OEB. Ainsi qu’il a déjà été exposé, les personnes qui cessent d’agir conjointement ne peuvent plus prendre part à la procédure, sous réserve toutefois d’une éventuelle décision prise au titre de l’article 104 CBE.

20. Il se peut également qu’à n’importe quel stade de la procédure, que ce soit la procédure d’opposition ou de recours, le représentant commun ne souhaite plus agir conjointement avec les autres membres du groupe, en d’autres termes qu’il désire se retirer de la procédure. Dans ce cas, il doit informer l’OEB de sa décision. Au niveau de la procédure, il en résulte qu’aux fins de la désignation d’un nouveau représentant commun, les dispositions de la règle 100(1) CBE s’appliquent à la procédure d’opposition en vertu de la dernière phrase de cette règle, et à la procédure de recours ultérieure en vertu de la règle 66(1) CBE. Il se peut aussi que le représentant commun cesse d’agir dans la procédure sans que l’OEB en soit informé. Dans ces deux cas, les autres personnes agissant en commun doivent prendre en temps utile les mesures appropriées afin de poursuivre la procédure et, si un nouveau représentant commun a été désigné, en informer l’OEB. Il n’est toutefois nul besoin, sur le plan pratique, de se prononcer sur la validité des actes de procédure accomplis par un membre du groupe qui n’est pas le représentant commun. Etant donné qu’un acte de procédure accompli par une personne non habilitée est traité par l’OEB de la même manière qu’une signature manquante (cf. la décision T 665/89 citée dans “La Jurisprudence des chambres de recours de l’OEB”, 3e édition 1998, point VI.K.5 dernier paragraphe, ainsi que les Directives relatives à l’examen pratiqué à l’OEB, A-IX, 3.1 dernier paragraphe), chaque personne agissant en commun ou toute autre personne agissant pour son compte peut accomplir un tel acte afin d’éviter de laisser passer un délai, à condition qu’il soit remédié à l’irrégularité dans un nouveau délai imparti par la Chambre dans la notification établie au titre de la règle 36(3) CBE qui est signifiée au représentant commun et envoyée pour information à la personne non habilitée qui a accompli l’acte en question. Il peut être remédié à l’irrégularité si l’acte de procédure est signé par le représentant commun. Si, pour une raison ou une autre, cette personne cesse d’agir conjointement avec les autres membres du groupe, l’acte doit être signé par un nouveau représentant commun désigné conformément à la règle 100 CBE. La Grande Chambre de recours est consciente du fait que d’autres questions peuvent se poser lorsque le représentant commun déclare qu’il souhaite rester le représentant commun, mais refuse de signer l’acte de procédure, ou lorsque l’une des personnes agissant en commun (ou plusieurs d’entre elles) n’est pas domiciliée dans l’un des Etats parties à la CBE. Toutefois, ces situations ne se présentent pas en l’espèce, si bien que la Grande Chambre n’a pas à se prononcer sur ces questions dans la présente décision.

21. Pour résumer, les personnes agissant en commun sont tenues d’agir ensemble par l’intermédiaire de leur représentant commun dûment désigné, et ce pendant toute la procédure, que ce soit la procédure d’opposition ou la procédure de recours.

DISPOSITIF

Par ces motifs, la Grande Chambre répond comme suit aux questions de droit que lui a soumises la chambre de recours technique 3.3.4 dans la décision T 272/95 :

1. Une opposition formée conjointement par deux personnes ou plus et qui répond par ailleurs aux exigences de l’article 99 CBE ainsi que des règles 1 et 55 CBE est recevable sur paiement d’une seule taxe d’opposition.

2. Lorsque la partie qui fait opposition est constituée de plusieurs personnes, c’est le représentant commun désigné conformément à la règle 100 CBE qui doit introduire le recours. Si le recours est formé par une personne non habilitée, la chambre considérera qu’il n’est pas dûment signé et invitera par conséquent le représentant commun à le signer dans un délai donné. La personne non habilitée qui a formé le recours doit être informée de cette invitation. Si l’ancien représentant commun ne participe plus à la procédure, un nouveau représentant commun doit être désigné conformément à la règle 100 CBE.

3. Afin de sauvegarder les droits du titulaire du brevet et dans l’intérêt de l’efficacité de la procédure, l’on doit savoir clairement pendant toute la procédure qui fait partie du groupe des co-opposants ou des co-requérants. Si l’un des co-opposants ou des co-requérants (y compris le représentant commun) a l’intention de se retirer de la procédure, l’OEB doit en être informé par le représentant commun ou par un nouveau représentant commun désigné conformément à la règle 100(1) CBE pour que ce retrait prenne effet.