http://www.epo.org/law-practice/case-law-appeals/recent/t960755fp1.html
Content reproduced from the Website of the European Patent Office as permitted by their terms of use.

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1999:T075596.19990806
Date de la décision : 06 Août 1999
Numéro de l’affaire : T 0755/96
Numéro de la demande : 90310085.7
Classe de la CIB : C07D 491/22
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 29.842K)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : DE | EN | FR
Versions : OJ
Titre de la demande : Analogue de la 10,11-méthylènedioxy-20(RS)camptothécine et de la 10,11-méthylènedioxy-20(S)-camptothécine
Nom du demandeur : RESEARCH TRIANGLE INSTITUTE
Nom de l’opposant :
Chambre : 3.3.01
Sommaire : Dans les procédures ex parte, la règle 71bis CBE confère à la division d’examen un pouvoir d’appréciation pour autoriser ou refuser des modifications des revendications avant de rendre une décision au titre de l’article 97 CBE. La division d’examen doit exercer ce pouvoir d’appréciation en tenant compte de l’ensemble des facteurs pertinents en l’espèce et en s’efforçant d’établir un juste équilibre entre l’intérêt du demandeur, qui doit pouvoir obtenir une protection appropriée par brevet de l’invention qu’il revendique, et l’intérêt de l’OEB, qui doit pouvoir conclure rapidement la procédure par la prise d’une décision. Si dans l’exercice de ce pouvoir d’appréciation, la division d’examen choisit de ne pas autoriser des modifications des revendications, elle doit exposer les motifs de son refus. Le simple fait de mentionner que les revendications ont été produites tardivement au regard de la règle 71bis CBE ne constitue pas un motif suffisant de refus au sens où l’entend la règle 68(2) CBE.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123
European Patent Convention 1973 R 71a
European Patent Convention 1973 R 86(3)
Mot-clé : Pouvoir d’appréciation conféré par la règle 71bis CBE pour autoriser ou refuser des modifications des revendications (oui)
Motifs suffisants pour ne pas autoriser des modifications des revendications (non)
Vice substantiel de procédure (oui)
Remboursement de la taxe de recours (oui)
Renvoi à la première instance pour poursuite de la procédure
Exergue :

Décisions citées :
G 0007/93
T 0182/88
T 0183/89
T 0872/90
T 0951/97
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0382/97
T 0367/01
T 0064/02
T 0425/02
T 0918/02
T 0960/04
T 0937/07
T 0334/08
T 0343/08
T 0545/08
T 1253/09
T 1354/09
T 1750/14
T 1751/14
T 1753/14
T 1754/14

Exposé des faits et conclusions

I. Le requérant a formé un recours à l’encontre de la décision de rejet de la demande n 90 310 085.7 (publiée sous le numéro 0 418 099) prise par la division d’examen.

II. Cette décision avait été rendue sur la base des revendications 1 à 39 déposées initialement.

La revendication indépendante 1 portait sur des composés 10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine substitués en position 9 et/ou 7.

La revendication indépendante 19 portait sur des composés 10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine ayant la forme d’une lactone ouverte.

La revendication indépendante 26 portait sur une méthode de préparation de la 9-nitro-10,11- méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine consistant à faire réagir de la 10,11- méthylènedioxy-20(S) ou de la 20(RS)-camptothécine avec un mélange d’acide sulfurique concentré et d’acide nitrique concentré.

La revendication indépendante 27 portait sur une méthode de préparation de la 9-amino-10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine par réduction du groupe 9-nitro du composé 9-nitro correspondant obtenu conformément à la revendication 26.

La revendication dépendante 28 portait sur la méthode selon la revendication 27, dans laquelle l’étape de réduction était réalisée par voie d’hydrogénation catalytique.

La revendication indépendante 29 portait sur une méthode de préparation d’un groupe de composés couverts par la revendication 1, consistant à faire réagir la 10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine, substituées par un groupe 9-amino ou 9-amino-7-C1-8 -alkyle, avec un acide aminé à groupe amino protégé ou un peptide contenant 1-4 unités d’acide aminé à groupe amino protégé, un anhydride d’acide carboxylique C4-10 saturé ou non saturé ou avec du phosgène, suivi d’une réaction avec une diamine primaire ou secondaire, branchée ou cyclique, ou un alcool tertiaire aminé.

La revendication indépendante 30 portait sur une méthode de préparation d’un groupe de composés de camptothécine ayant la forme d’une lactone ouverte, par voie d’hydrolyse de l’anneau lactonique d’une camptothécine telle que définie dans la revendication 1 avec une solution aqueuse d’un hydroxyde métallique monovalent.

III. La division d’examen avait estimé que considéré à la lumière des documents

(B) EP-A-0 325 247, et

(C) J. Med. Chem., 29(11), 1986, 2358-63,

l’objet de la revendication 1 telle qu’initialement déposée n’impliquait pas d’activité inventive au sens de l’article 56 CBE.

La division d’examen avait en outre refusé de prendre en considération une première et une deuxième requêtes subsidiaires présentées toutes les deux le 26 mars 1996, c’est-à-dire la veille de la procédure orale, au motif que ces requêtes avaient été présentées tardivement au regard de la règle 71bis CBE.

Les revendications 1 à 6 selon la première requête subsidiaire concernaient la préparation des composés tels que définis dans les revendications 1 et 19 initialement déposées, et impliquaient une nitration de la 10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine et la réduction des dérivés 9-nitro ainsi formés, telles que revendiquées respectivement dans les revendications 26 et 27 initialement déposées. La revendication 7 portait sur un groupe restreint de composés couverts par la revendication 1 initialement déposée. Les revendications 8 et 9 portaient sur des composés préférés tels que revendiqués respectivement dans les revendications initiales 16 (dans laquelle R est NH2) et 15.

La deuxième requête subsidiaire correspondait à cette requête principale, à ceci près qu’elle ne comportait pas les revendications de composés 7 à 9.

De surcroît, la division d’examen avait également refusé de prendre en considération une requête subsidiaire que le demandeur avait déposée au cours de la procédure orale en vue d’obtenir la délivrance d’un brevet sur la base des revendications 26 à 30 initialement déposées et qui portait sur une méthode de préparation des composés tels que définis dans les revendications 1 à 19 initialement déposées. La division d’examen avait simplement indiqué à ce propos dans le procès-verbal de la procédure orale qu’elle ne pouvait immédiatement porter un jugement sur cette requête subsidiaire.

IV. Le requérant a déposé le 8 août 1996, en même temps que le mémoire exposant les motifs du recours, le texte des revendications 1 à 9 à titre de requête principale ainsi que le texte des revendications 1 à 6 à titre de requête subsidiaire n 1. Ces requêtes correspondaient à la première et à la deuxième requêtes subsidiaires qui avaient été déposées le 26 mars 1996 et n’avaient pas été prises en considération par la division d’examen.

V. Le requérant a affirmé que le refus de la division d’examen soit d’accepter les deux requêtes présentées le 26 mars 1996, soit de se prononcer sur la brevetabilité des revendications 26 à 30 telles qu’initialement déposées, constituait un vice substantiel de procédure. Il a fait référence à ce propos à la description de l’actuelle demande de brevet, qui faisait clairement ressortir le caractère surprenant du résultat de la réaction de nitration revendiquée dans la revendication initiale 26.

Il a prétendu en outre que l’objet revendiqué impliquait une activité inventive, en faisant valoir que les documents cités ne divulguaient pas la nitration directe de la 10,11-méthylènedioxy-20(S) ou 20(RS)-camptothécine, et ne pouvaient donc suggérer à l’homme du métier que cette réaction permettrait une préparation sélective du composé 9-nitro correspondant. A propos des revendications 7 à 9, il a affirmé que les composés qui y étaient revendiqués présentaient de manière surprenante une activité biologique accrue.

VI. Le requérant a demandé l’annulation de la décision attaquée et le renvoi de l’affaire à la division d’examen, à charge pour celle-ci de délivrer un brevet sur la base de la requête principale ou de la requête subsidiaire présentées le 8 août 1996.

Il a demandé par ailleurs le remboursement de la taxe de recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Rappel de la genèse de la règle 71 bis CBE

2.1 La nouvelle règle 71bis CBE est entrée en vigueur le 1er juin 1995 à la suite de la décision prise par le Conseil d’administration le 13 décembre 1994 (JO OEB 1995, 9). Le texte de cette règle est le suivant :

“Préparation de la procédure orale (1) Dans la citation, l’Office européen des brevets signale les questions qu’il juge nécessaire d’examiner aux fins de la décision à rendre. En même temps il fixe une date jusqu’à laquelle des documents peuvent être produits en vue de la préparation de la procédure orale. La règle 84 n’est pas applicable. De nouveaux faits ou preuves présentés après cette date peuvent ne pas être pris en considération, à moins qu’il ne convienne de les admettre en raison d’un changement intervenu dans les faits de la cause.

(2) Si le demandeur ou le titulaire du brevet a reçu communication des motifs s’opposant à la délivrance ou au maintien du brevet, il peut être invité à fournir au plus tard à la date visée au paragraphe 1, deuxième phrase, des pièces satisfaisant aux conditions requises par la convention. Le paragraphe 1, troisième et quatrième phrases, est applicable.”

2.2 Les raisons qui ont conduit le Conseil d’administration à introduire cette règle sont indiquées dans l’exposé des motifs du Président de l’Office européen des brevets figurant dans le document CA/12/94 Rév. 1 en date du 17 octobre 1994. Dans cet exposé, publié au JO OEB 1995, pages 418 et 419; Dans la décision de la Chambre, celle-ci cite le document dans sa version originale. Il a été publié au Journal officiel avec de légères modifications rédactionnelles) il est précisé :

“7.1 En règle générale, la procédure orale doit permettre de rendre une décision qui met fin à la procédure. Cela suppose que cette décision ait été suffisamment préparée durant la procédure écrite (les faits doivent avoir été tirés au clair, et les questions à examiner doivent avoir été délimitées). En règle générale, tout au moins dans le cas des procédures de délivrance et d’opposition, l’OEB établit pour sa part une citation à cet effet, dans laquelle il signale les questions qui lui paraissent devoir être examinées.

7.2 Les parties quant à elles préparent en général la procédure orale en rédigeant des communications. Pour pouvoir contribuer au bon déroulement de la procédure, ces communications doivent parvenir suffisamment tôt à l’Office et, le cas échéant, aux autres parties, afin de leur permettre de se prononcer sur le fond à ce sujet au cours de la procédure. Les communications qui ne sont présentées qu’au stade de la procédure orale, ou peu de temps avant cette procédure, ne répondent pas à ces conditions et conduisent fréquemment la partie adverse à objecter qu’elle ne peut se prononcer sur ce nouvel exposé des faits qui l’a prise au dépourvu.

7.3 C’est pourquoi la règle 71bis(1) qui est proposée officialise la pratique actuelle qui veut que l’OEB fixe dans la citation une date limite pour la production des communications. Elle précise que passé cette date, les nouveaux faits invoqués et les nouvelles preuves produites ne seront pris en considération que dans la mesure où ils répondent à un changement intervenu dans les faits de la cause, ce qui est le cas notamment lorsque la partie adverse a produit des moyens nouveaux dans les communications qu’elle a adressées en vue de préparer la procédure orale.

7.4 La règle 71bis(1) donne dans le cas particulier de la présentation tardive des faits et preuves une forme concrète au pouvoir d’appréciation de l’Office visé à l’article 114(2) CBE. Dans ce cas nouveau qu’elle prévoit, cette règle expose clairement au demandeur quelles sont au niveau de la procédure les conséquences d’un retard, et elle dispense dans une certaine mesure l’Office d’avoir à exposer ses motifs lorsqu’il décide de ne pas tenir compte de ces moyens invoqués tardivement. La règle 71bis ne limite pas le pouvoir d’appréciation prévu à l’article 114, elle permet néanmoins une application plus flexible de cette disposition en cas de retard. Elle va ainsi dans le sens de la jurisprudence des chambres de recours qui veut qu’en cas d’abus, les faits et les preuves présentés tardivement sans raison valable soient rejetés.

7.5 La modification proposée dans cette règle 71bis(2) est destinée elle aussi à accélérer la procédure et à éviter en outre que la partie adverse ne soit prise au dépourvu par des moyens nouveaux invoqués au cours de la procédure orale. Si l’Office a annoncé au demandeur/titulaire du brevet avant la procédure orale, en lui indiquant ses raisons, qu’il doit s’attendre à un rejet de sa demande ou à une révocation de son brevet, il est probable que celui-ci réagira si un délai suffisant lui est accordé pour présenter ses observations.”

3. Objectif poursuivi par la règle 71bis CBE

3.1. Il ressort du texte de la règle 71bis CBE et de l’exposé des motifs de l’introduction de cette nouvelle règle (cf. le point 2.2 supra), que cette règle vise notamment à éviter que les instances de l’OEB chargées de l’examen quant au fond ainsi que, dans le cadre des procédures d’opposition, les autres parties, ne soient prises au dépourvu par de nouveaux faits ou preuves (règle 71bis(1) CBE) ou par de nouvelles requêtes revêtant la forme de demandes de modifications (règle 71bis(2) CBE), et à permettre la prise d’une décision finale à la fin de la procédure orale.

3.2 En outre, cette règle confère à l’OEB un pouvoir d’appréciation pour admettre ou rejeter de nouveaux faits ou preuves invoqués tardivement et/ou des revendications modifiées. Ce pouvoir d’appréciation découle en particulier de la quatrième phrase du premier paragraphe de cette règle qui prévoit que de nouveaux faits ou preuves peuvent ne pas être pris en considération, disposition qui, considérée conjointement avec la règle 71bis(2), est applicable par analogie à la production de nouvelles requêtes visant à introduire des modifications (cf. également la décision T 951/97, JO OEB 1998, 440, point 5.1).

3.3 A cet égard, la Chambre fait observer que c’est en fait l’article 114(2) CBE qui confère à l’OEB le pouvoir d’accepter ou de rejeter des faits ou preuves nouveaux présentés tardivement, et que le pouvoir de rejeter de nouvelles requêtes concernant des modifications est en fait régi par l’article 123 CBE et par les dispositions correspondantes du règlement d’exécution, à savoir la règle 86(3) CBE pour les procédures devant une division d’examen et également la règle 57bis, qui ne vaut quant à elle que pour les procédures devant une division d’opposition.

Ladite règle 86(3) dispose que toutes autres modifications ultérieures sont subordonnées à l’autorisation de la division d’examen, si le demandeur, après avoir reçu la première notification de la division d’examen, a, en réponse à ladite notification, modifié de sa propre initiative la description, les revendications et les dessins.

4. Exercice du pouvoir d’appréciation conféré par la règle 71bis pour ce qui est des modifications

4.1 L’Office européen des brevets est chargé de délivrer des brevets européens qui soient conformes à la Convention sur le brevet européen. Par ailleurs, il est également souhaitable que la procédure devant l’OEB soit aussi efficace que possible, ce qui ne pourrait guère être obtenu si le pouvoir d’appréciation conféré par la règle 71bis CBE était exercé de manière purement formaliste, l’Office européen des brevets refusant de prendre en considération de nouvelles revendications pour la simple raison qu’elles n’auraient pas été déposées d’ici la date limite fixée dans la citation à la procédure orale, même si la requête satisfaisait en fait à toutes les conditions requises par la CBE et ne soulevait pas de nouvelles questions. Devant ce refus, il serait nécessaire alors de former un recours pour obtenir que la requête soit prise en considération dans la procédure et que l’affaire soit renvoyée à la première instance, ce qui occasionnerait des frais supplémentaires et des retards.

4.2 A cet égard, la Grande Chambre a eu à examiner un cas dans lequel un demandeur avait déjà donné son accord sur le texte dans lequel le brevet devait être délivré et où l’invitation visée à la règle 51(6) CBE avait été émise, c’est-à-dire un cas dans lequel la procédure d’examen était parvenue à un stade très avancé. Elle a estimé que lorsqu’une division d’examen exerce le pouvoir d’appréciation que lui confèrent l’article 123 et la règle 86(3) CBE pour décider si elle doit ou non accepter une nouvelle modification, elle doit “tenir compte à la fois de l’intérêt du demandeur à obtenir un brevet et de l’intérêt de l’OEB à conclure la procédure d’examen en rendant une décision, et les mettre en balance” en tenant compte de tous les éléments pertinents en l’espèce (cf. décision G 7/93, JO OEB 1994, 775, et notamment le point 2.2, premier paragraphe, et le point 2.5).

4.3. Il importe ici de distinguer entre la phase d’examen de la demande et la phase de l’opposition. Il ressort clairement de l’exposé des motifs de l’introduction de la règle 71bis CBE (cf. le point 2.2 supra) qu’il a été veillé tout particulièrement à ce que dans le cas des procédures d’opposition, les autres parties ne puissent être prises au dépourvu. Les parties ne pouvant être représentées que par des mandataires agréés, qui doivent consulter leurs clients et leurs experts techniques pour que ceux-ci leur donnent d’autres instructions sur la façon dont il convient de réagir à la présentation de nouvelles requêtes ou de nouvelles preuves, l’OEB pourrait avoir de bonnes raisons de refuser des pièces produites après la date limite indiquée dans la citation à la procédure orale, ou de reporter la tenue de la procédure orale en mettant les coûts à la charge de la partie fautive.

4.4 Les considérations en question ne valent pas toutefois dans le cas de la procédure conduite devant une instance de l’OEB chargée de l’examen quant au fond, l’instance d’examen disposant de ses propres experts techniques et n’ayant pas à demander des instructions à des tiers. Si elle s’est préparée à la procédure orale, elle devrait normalement, même lorsqu’il s’agit de requêtes présentées au cours de cette procédure, pouvoir apprécier, après avoir le cas échéant interrompu pour ce faire la procédure orale, s’il n’est manifestement pas possible dans le cadre de la CBE de faire droit à la nouvelle requête, en vertu par exemple des articles 123(2), 84, ou 82 CBE ou de la règle 86(4) CBE, et décider par conséquent de ne pas tenir compte de cette nouvelle requête dans la procédure.

4.5 Compte tenu des considérations développées ci-dessus, la Chambre estime donc qu’une division d’examen ne devrait pas exercer de manière purement formaliste le pouvoir d’appréciation qui lui est conféré par la règle 71bis CBE pour rejeter de nouvelles requêtes, et ce notamment pour les raisons suivantes :

a) il est important de tenir des procédures orales devant une division d’examen, ces procédures étant bien utiles, puisqu’elles permettent à la division d’examen de se faire une idée définitive de ce que le demandeur considère à la lumière de l’état de la technique comme étant son invention, et qu’elles donnent en toute équité au demandeur la possibilité de répondre aux objections de l’OEB, ce qui pourra nécessiter qu’il modifie sa/ses requête(s), même à un stade avancé de la procédure, et produise ensuite des revendications qui lui paraissent satisfaire au mieux aux exigences de la Convention et répondre à ses propres besoins ;

b) il est important de ne pas modifier au détriment du demandeur le juste équilibre qui doit être établi entre l’intérêt du demandeur, qui doit pouvoir obtenir la délivrance d’un brevet, et l’intérêt de l’Office, qui doit assurer l’efficacité du déroulement de la procédure ;

c) la procédure ne pourrait plus être conduite de manière efficace si les nouvelles requêtes déposées après la date limite fixée par la règle 71bis CBE avaient de grandes chances d’être rejetées, car les demandeurs seraient amenés alors à présenter prématurément, par simple mesure de précaution, un grand nombre de requêtes subsidiaires, occasionnant à l’OEB et au demandeur beaucoup de travail superflu ;

d) la procédure ne pourrait plus être conduite de manière efficace si une division d’examen pouvait rejeter par pur formalisme, sans aucun examen, des requêtes présentées tardivement au regard de la règle 71bis CBE, puisque la même requête pourrait ensuite, conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours, être acceptée au stade du recours et renvoyée à la division d’examen pour examen des questions non résolues, ce qui serait contre-productif, du point de vue aussi bien de la rapidité que de l’efficacité de l’ensemble de la procédure de délivrance.

4.6 La Chambre tient toutefois à souligner à ce propos qu’il n’est nullement dans ses intentions de renoncer à exiger des demandeurs qu’ils fassent tout leur possible pour respecter la date limite fixée dans la citation à la procédure orale, car des requêtes déposées dans les délais peuvent effectivement contribuer à résoudre rapidement les problèmes, et même parfois rendre superflue la tenue d’une procédure orale. En outre, les demandeurs qui ne respecteraient pas les délais se feraient tort à eux-mêmes, puisque dans ce cas la division d’examen serait moins bien préparée lorsqu’il s’agirait de faire des suggestions utiles sur la manière dont le demandeur pourrait répondre aux objections qui subsistent, et toutes les parties concernées auraient à pâtir du temps réduit dont elles disposeraient dans ces conditions.

4.7 Par ailleurs, il est constant dans la jurisprudence des chambres de recours qu’une instance de l’OEB chargée de l’examen quant au fond doit indiquer dans sa décision pour quelles raisons elle a décidé, dans l’exercice du pouvoir d’appréciation que lui confère la règle 86(3) CBE, de ne pas accepter de modification des revendications (cf. par exemple les décisions T 182/88, JO OEB 1990, 287 ; T 183/89 (non publiée au JO OEB), points 2.5 et 2.7, et T 872/90 (non publiée au JO OEB), point 2.1, paragraphes 3 et 4). Etant donné que les considérations valant pour l’application de la règle 71bis CBE sont comparables à celles qui valent pour l’examen de requêtes présentées au titre de la règle 86(3) CBE, la Chambre estime qu’une instance est également tenue d’exposer ses motifs lorsqu’elle exerce le pouvoir d’appréciation que lui confère la nouvelle règle 71bis CBE. Pour justifier un refus, il ne suffit donc pas de faire référence au pouvoir d’appréciation conféré par la règle 71bis.

5. Requêtes refusées par la division d’examen au motif qu’elles ont été présentées tardivement

5.1 Dans la présente espèce, la division d’examen a décidé de ne pas prendre en considération les deux jeux de revendications produits la veille de la procédure orale, l’un à titre de requête principale et l’autre à titre de première requête subsidiaire, ainsi que la requête présentée au cours de la procédure orale, par laquelle le requérant lui demandait de procéder à un examen et de prendre une décision sur la base des revendications de procédé qu’il avait déposées à l’origine, à savoir les revendications 26 à 30.

5.2 Si la division d’examen avait décidé de ne pas prendre en considération les deux requêtes présentées la veille de la procédure orale, c’était uniquement au motif qu’elles avaient été déposées tardivement au regard de la règle 71bis CBE. Or la Chambre estime que ce motif invoqué par la division d’examen pour rejeter ces deux requêtes ne peut être considéré comme une raison suffisante pouvant justifier l’exercice par la division d’examen de son pouvoir d’appréciation : pour la Chambre, il s’agit là plutôt d’une simple référence au pouvoir d’appréciation conféré à la division d’examen par ladite règle 71bis CBE.

5.3 Pour justifier par ailleurs son refus de prendre en considération la requête présentée au cours de la procédure orale, la division d’examen s’est bornée à constater dans le procès-verbal de la procédure orale qu’elle ne pouvait se prononcer dans l’immédiat au sujet de cette requête (cf. le dernier paragraphe), mais ce n’est là qu’une simple affirmation qui ne s’appuie sur aucun fait ni sur aucune justification juridique.

5.4 La Chambre estime par conséquent que dans les arguments qu’elle a invoqués pour refuser de prendre en considération dans la procédure les requêtes présentées par le requérant, la division d’examen n’a pas cherché à établir un juste équilibre entre l’intérêt de l’OEB, qui doit pouvoir clore rapidement la procédure, et l’intérêt du requérant, qui doit pouvoir obtenir une protection par brevet appropriée pour son invention, et que par conséquent il n’est pas possible de se fonder sur ces arguments pour décider s’il y a lieu d’exercer le pouvoir d’appréciation conféré par la règle 71bis CBE.

5.5 La Chambre conclut par conséquent des considérations qui précèdent que la décision attaquée n’a pas été motivée comme l’exige la règle 68(2) CBE, ce qui constitue un vice substantiel de procédure.

6. Requêtes déposées au stade du recours

6.1 La requête principale et la première requête subsidiaire présentées au stade du recours sont identiques à la première et la deuxième requêtes subsidiaires qui avaient été présentées au cours de la procédure orale devant la division d’examen et que la division d’examen avait refusé de prendre en compte dans la procédure, en se bornant simplement à faire référence à la règle 71bis CBE. Le requérant renonce au stade du recours à maintenir la requête principale présentée à la division d’examen, qui l’avait rejetée pour des raisons de fond dans la décision faisant l’objet du recours.

6.2 Un principe général applicable dans la procédure de recours engagée dans le cadre de la procédure de délivrance veut que les requêtes portant sur de nouvelles revendications produites avec l’exposé des motifs du recours soient prises en compte dans la procédure, à moins qu’elles ne doivent manifestement être rejetées en vertu de la CBE. En l’espèce, la requête principale et la requête subsidiaire ne semblent pas manifestement appeler des objections, et par conséquent la Chambre, usant du pouvoir d’appréciation que lui confèrent l’article 111(1) et la règle 86(3) CBE, décide de les prendre en considération dans la procédure.

6.3 En règle générale, tout demandeur a droit à ce que ses requêtes soient examinées par deux instances. Les requêtes actuellement en instance devant la Chambre n’ont pas encore été examinées par la division d’examen, et on ne peut attendre du requérant ou de la Chambre qu’ils puissent, sur la seule base de l’avis émis par la division d’examen au sujet de la requête principale différente qui lui avait été soumise lors de la procédure orale du 27 mars 1996, connaître le jugement que la division d’examen pourrait porter sur les requêtes actuelles. Par conséquent, la Chambre, exerçant les pouvoirs que lui confère l’article 111(2), renvoie la demande à la division d’examen, à charge pour celle-ci de poursuivre la procédure.

7. Remboursement de la taxe de recours

Il a été fait droit en tous points au recours formé par le demandeur. Compte tenu de l’existence de vices substantiels de procédure et du fait que s’ils n’avaient pas existé, il n’aurait probablement pas été nécessaire pour le demandeur de former un recours, la Chambre juge équitable de rembourser la taxe de recours conformément à la règle 67 CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision faisant l’objet du recours est annulée.

2. L’affaire est renvoyée à la division d’examen, à charge pour celle-ci de poursuivre la procédure.

3. Il est fait droit à la requête en remboursement de la taxe de recours.