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European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2004:J000201.20040204 | ||||||||
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Date de la décision : | 04 Fevrier 2004 | ||||||||
Numéro de l’affaire : | J 0002/01 | ||||||||
Numéro de la demande : | 99104102.1 | ||||||||
Classe de la CIB : | – | ||||||||
Langue de la procédure : | EN | ||||||||
Distribution : | A | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | – | ||||||||
Nom du demandeur : | THE TRUSTEES OF DARTMOUTH COLLEGE | ||||||||
Nom de l’opposant : | – | ||||||||
Chambre : | 3.1.01 | ||||||||
Sommaire : | I. L’une des conséquences découlant de la condition d’unicité visée à l’article 118 CBE réside dans le fait que lorsque deux personnes ou plus déposent conjointement une demande, elles ne peuvent acquérir un statut procédural différent de celui d’un demandeur unique, car dans le cas contraire, chacune d’entre elles pourrait accomplir des actes de procédure différents et contradictoires, y compris le dépôt de versions différentes du brevet à délivrer II. Par conséquent, lorsque deux demandeurs ou plus ont déposé conjointement une demande (la “demande initiale”) et que les conditions de l’article 61 et de la règle 20(3) CBE n’ont pas été observées, le droit de déposer une demande divisionnaire sur la base de la demande initiale au titre de l’article 76 CBE n’est dévolu que conjointement aux demandeurs initiaux inscrits, et non à l’un d’entre eux ou à une partie d’entre eux seulement. |
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Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Demande de brevet au nom de plusieurs demandeurs – demande divisionnaire au nom d’une partie seulement des demandeurs initiaux – non – sauf si l’article 61 et la règle 20 CBE sont observés | ||||||||
Exergue : |
– |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le recours est dirigé contre la décision de la section de dépôt de l’Office européen des brevets de ne pas traiter la demande en litige, à savoir la demande de brevet européen n° 99 104 102.1, comme une demande divisionnaire européenne de la demande de brevet européen initiale n° 96 921 309.9.
II. La demande en litige a été déposée le 1er mars 1999 au nom de The Trustees of Dartmouth College, comme constituant une demande divisionnaire de la demande initiale n° 96 921 309.9, laquelle a été déposée le 6 juin 1996 comme demande PCT (demande internationale n° PCT/US96/09137) au nom de The Trustees of Dartmouth College et Nederlandse Organisatie Voor Toegepast- Natuurwetenschappelijk Onderzoek. La demande initiale revendiquait la date de priorité du 7 juin 1995.
III. Après avoir informé le requérant qu’elle estimait que la demande en litige ne pouvait être traitée comme demande divisionnaire, et après avoir reçu la réponse du requérant, la section de dépôt a décidé le 26 juillet 2000 que la demande ne serait pas traitée comme demande divisionnaire au motif que, dans le cas d’une pluralité de demandeurs, une demande divisionnaire ne pouvait être déposée qu’au nom de tous les demandeurs désignés dans la demande initiale.
Une demande divisionnaire européenne ne peut être déposée que par le même demandeur qui a déposé la demande européenne initiale dont elle est issue. L’article 4G de la Convention de Paris dispose que le demandeur a le droit de diviser la demande de brevet. La règle 25(1) CBE et les Directives relatives à l’examen, partie A, chapitre IV, point 1.1.3 ont également été citées.
Dans la procédure devant l’OEB, le demandeur est réputé habilité à exercer le droit au brevet européen (article 60(3) CBE). L’OEB n’a pas à examiner les questions relatives à la titularité du droit au brevet européen, celles-ci relevant du droit national (article 61 CBE).
Lorsque la demande initiale est déposée par plusieurs demandeurs, ces derniers sont réputés être titulaires conjointement du droit au brevet européen en vertu de l’article 60(3) CBE et ne peuvent dès lors exercer ce droit que conjointement dans les procédures devant l’OEB.
La décision J 34/86 de la chambre de recours juridique, portant sur un cas exceptionnel, n’est pas applicable en l’espèce, étant donné que dans ce cas, le demandeur initial avait admis qu’il n’était pas détenteur du droit au brevet et que la question des droits des codemandeurs n’était plus posée.
L’argument du demandeur selon lequel il n’aurait pas été possible de produire une désignation valable de l’inventeur si la demande en litige avait été déposée au nom des deux demandeurs initiaux est sans portée. Aux termes de l’article 81, deuxième phrase, et de la règle 17(1) CBE, il suffit qu’un seul des codemandeurs tienne son droit au brevet européen de l’inventeur désigné et en outre, l’exactitude des indications données dans la désignation de l’inventeur n’a pas été vérifiée par l’OEB.
IV. Le 25 septembre 2000, le demandeur a formé un recours contre cette décision, a acquitté la taxe de recours le même jour et produit le mémoire exposant les motifs de recours le 4 décembre 2000.
V. La procédure orale s’est tenue devant la Chambre le 4 février 2004, après que celle-ci a notifié au requérant son avis préliminaire sur le recours.
Au début de la procédure orale, la Chambre a informé le requérant que la procédure orale n’était pas publique. Bien que les conditions de la règle 48(2) CBE relatives à la non-publication de la demande n’aient manifestement pas été remplies, la demande divisionnaire en litige n’a en fait pas été publiée. L’article 116 CBE exigeant la publication comme condition préalable à la tenue d’une procédure orale publique, la Chambre a rectifié la citation initiale à une procédure orale publique.
VI. Les moyens invoqués par le requérant dans son mémoire de recours et au cours de la procédure orale peuvent se résumer comme suit :
1. La demande initiale à l’origine de la présente demande divisionnaire concerne deux inventions distinctes.
L’invention 1 est l’invention générique portant sur l’utilisation d’un antagoniste de gp39 pour la production d’un médicament visant à atténuer certaines destructions tissulaires associées à des désordres auto-immuns.
L’invention 2 est l’invention spécifique relative à l’utilisation de l’antagoniste pour la production d’un médicament visant à atténuer les destructions tissulaires associées à la sclérose en plaques.
L’invention générique 1 a été faite par le Dr Noelle seul, dont les droits, en vertu de son contrat de travail, ont été cédés au requérant. L’invention 2 résulte de la collaboration entre le Dr Noelle et un autre chercheur dont les droits, en vertu de son contrat de travail avec le codemandeur initial, ont été cédés à ce dernier.
Par conséquent, conformément à l’article 60(1) CBE, le droit au brevet européen concernant l’invention 1 sur laquelle porte la demande divisionnaire appartient uniquement au requérant, tandis que le droit au brevet européen pour l’invention 2 appartient conjointement aux deux demandeurs initiaux, qui ont dès lors été correctement désignés comme “codemandeurs” dans la demande initiale.
2. Selon l’article 60(3) CBE, le requérant, en qualité de codemandeur initial, est réputé habilité à exercer le droit au brevet européen.
Ni les articles 58, 60(3), 76 CBE ou la règle 25 CBE, ni l’article 4G de la Convention de Paris n’imposent de restrictions se rapportant au nom du déposant d’une demande divisionnaire. Par conséquent, il est possible d’interpréter le terme “demandeur” au sens large, si bien que chacun des codemandeurs peut être un “demandeur” au sens de ces dispositions. Comme rien n’indique qu’une interprétation du terme “demandeur” au sens étroit est voulue et justifiée, – c’est-à-dire que ce terme désigne uniquement tous les codemandeurs à la fois -, il y a lieu d’interpréter le terme au sens large.
L’article 76(1) CBE dispose que la demande divisionnaire est considérée comme déposée à la date de dépôt de la demande initiale sous réserve que la demande divisionnaire n’ait pas été déposée pour des éléments qui s’étendent au-delà du contenu de la demande initiale telle que déposée. N’utilisant pas le terme “demandeur”, l’article 76 CBE n’établit aucune restriction quant à l’identité du demandeur, et la règle 25 CBE ne comporte, elle non plus, aucune autre condition de cet ordre. De plus, la question de savoir qui est habilité à déposer une demande divisionnaire est une question de droit substantiel et non de procédure, comme cela a été constaté pour des faits semblables dans la décision J 11/91 en date du 5 août 1992 (point 2.3.4 des motifs). Selon l’article 76(3) CBE, seule la procédure relative à une demande divisionnaire peut être concernée par le règlement d’exécution.
De même, une interprétation du terme “demandeur” au sens étroit ne peut découler de l’article 4G de la Convention de Paris. La CBE constituant un arrangement particulier au sens de l’article 19 de la Convention de Paris (cf. préambule de la CBE) et la règle 25 CBE étant de rang inférieur dans la hiérarchie des lois, il y a lieu d’interpréter cette dernière conformément à l’article 4G de la Convention de Paris, comme la Chambre de recours juridique l’a d’ailleurs fait dans la décision J 11/91. Une interprétation du terme “demandeur” visé à la règle 25 CBE dans un sens étroit serait donc contraire à l’article 4G de la Convention de Paris.
Rien dans les travaux préparatoires ne suggère une interprétation au sens étroit. Le terme “demandeur” ne figure pas dans le premier projet de ce qui est maintenant devenu la règle 25 CBE. Le requérant a produit un extrait du procès-verbal de la Conférence diplomatique de Munich pour l’institution d’un système européen de délivrance de brevets (M/PR/I, points 199 à 211, article 74(76) – demandes divisionnaires européennes). Cet extrait montre que le législateur ne comptait nullement imposer au demandeur d’une demande divisionnaire une autre “condition particulière” au sens de l’article 76(3) CBE.
Aucun élément pertinent pour la présente affaire ne peut être déduit des articles 59 et 118 CBE cités par la Chambre dans sa notification, car aucun d’entre eux ne traite du statut ou des droits d’une pluralité de demandeurs. De même, la décision G 3/99 citée par la Chambre ne permet pas de tirer de conclusions quant au statut des demandeurs multiples, étant donné que cette décision concerne uniquement les droits procéduraux des co-opposants. La décision précise de surcroît que les membres du groupe de co- opposants ont chacun en fait un statut à part entière car chacun d’entre eux peut se retirer individuellement de la procédure.
Dans la décision J 34/86 citée par la section de dépôt, l’article 60(3) CBE n’est même pas évoqué. Dans les décisions J 18/93 datée du 2 septembre 1994 et J 17/96 datée du 3 décembre 1996, des rectifications consistant à remplacer le nom du demandeur ont été autorisées dans certaines circonstances. En l’espèce cependant, le dépôt de la demande divisionnaire en litige au nom du seul requérant n’était pas une erreur, mais un acte intentionnel, et il n’existait aucun litige concernant la propriété des droits au sens de l’article 61 CBE. Aussi ne saurait-on soutenir l’argument avancé par la Chambre dans sa notification, selon lequel il serait injuste qu’en vertu d’une disposition de procédure, le premier des codemandeurs initiaux agissant illicitement puisse priver les autres codemandeurs de leurs droits à une demande divisionnaire. L’OEB devrait en outre respecter la présomption selon laquelle les demandeurs ont agi de bonne foi.
3. Pour se conformer à la règle 17 CBE, le codemandeur initial n’a pas pu être mentionné comme codemandeur de la demande divisionnaire, étant donné que l’inventeur n’avait transféré aucun droit sur l’invention 1 à ce codemandeur. De plus, le codemandeur n’a pu transférer aucun droit au requérant lui permettant de poursuivre la demande divisionnaire en son seul nom sans contrevenir à la règle 20 CBE, puisque le codemandeur n’a jamais été titulaire d’un droit au brevet européen à délivrer pour l’invention 1.
4. La question soulevée en l’espèce n’est pas abordée dans les Directives relatives à l’examen, qui se bornent à préciser dans la version publiée en juillet 1999, soit après la date de dépôt de la présente demande divisionnaire, que seul le demandeur enregistré peut déposer une demande divisionnaire.
5. Lors de la procédure orale, le requérant a soutenu que, selon les résultats d’une enquête réalisée par son mandataire, huit des Etats parties à la CBE acceptaient, dans certaines conditions administratives, le dépôt de demandes divisionnaires par une partie seulement des demandeurs initiaux. Pour attester de la pratique au Royaume-Uni, le requérant a produit un extrait de l’ouvrage “Manual of Patent Practice in the UK Patent Office”, 5e édition, mai 2003, points 15.10 à 15.34, et s’est référé en particulier au point 15.24.
6. Selon la décision G 3/92, point 3 des motifs, la fiction prévue à l’article 60(3) CBE dispense l’OEB de la nécessité de vérifier si le demandeur est habilité à exercer le droit au brevet européen. Par conséquent, l’OEB n’a pas le pouvoir de dénier au présent requérant l’habilitation à exercer le droit au brevet européen auquel peut donner lieu la demande divisionnaire en litige.
7. Les points soulevés par le requérant constituent des questions de droit d’importance fondamentale qui justifient la saisine de la Grande Chambre de recours aux fins d’une application uniforme du droit.
VII. Dans sa requête principale, le requérant demande que la décision de la section de dépôt soit annulée.
Dans sa première requête subsidiaire, le requérant demande que la question suivante soit soumise à la Grande Chambre de recours:
“Lorsque plusieurs demandeurs sont mentionnés dans une demande de brevet européen initiale en instance, une demande divisionnaire peut-elle être valablement déposée si le dépôt n’est pas effectué au nom de tous les demandeurs ?”
Dans sa deuxième requête subsidiaire, le requérant demande que la question suivante soit soumise à la Grande Chambre de recours:
“La fiction juridique prévue à l’article 60(3) CBE, selon laquelle le demandeur est réputé habilité à exercer le droit au brevet européen, dispense-t-elle l’OEB seulement de la nécessité d’examiner l’existence de l’habilitation ?”
Motifs de la décision
1. La demande en litige a été déposée au nom du requérant, The Trustees of Dartmouth College, comme demande divisionnaire européenne de la demande de brevet européen n° 96 921 309.9. A la date de dépôt de la demande en litige, les demandeurs inscrits pour la demande initiale étaient le requérant et la Nederlandse Organisatie Voor Toegepast-Natuurwetenschappelijk Onderzoek (le “codemandeur”).
2. Le requérant a contesté la position de la section de dépôt qui a estimé qu’en présence de plusieurs demandeurs inscrits pour une demande de brevet européen, le droit de déposer une demande divisionnaire au titre de l’article 76 CBE est uniquement réservé conjointement aux demandeurs initiaux qui ont été inscrits et non à un seul d’entre eux.
2.1 Il est exact que les dispositions de la CBE citées par le requérant et l’article 4G de la Convention de Paris se réfèrent au “demandeur” au singulier. Cela ne signifie toutefois pas que ce terme doit être compris comme faisait référence à une seule personne uniquement. Selon la Chambre, ce terme désigne la fonction ou le statut de demandeur plutôt que le nombre précis de personnes qui représentent le ou les demandeurs.
2.2 Lors de la procédure orale devant la Chambre, le requérant a souligné qu’en l’absence de fondement explicite applicable aux codemandeurs permettant d’interpréter le terme “demandeur” dans un sens étroit, l’OEB devait donner à ce terme une interprétation plus large, de telle sorte qu’il se réfère à chacun des codemandeurs pris individuellement.
Il n’est pas certain que les deux différentes interprétations du terme “demandeur” proposées par le requérant puissent réellement être qualifiées d'”étroites” ou de “larges”. La question importe cependant peu, étant donné qu’il n’existe aucune règle générale de droit qui prescrive qu’en l’absence de signification littérale spécifique, un terme doit être interprété dans un sens étroit ou dans un sens large, quelle que soit la signification que ce sens puisse revêtir dans un cas concret.
Conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours et aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, il convient d’utiliser toutes les méthodes reconnues en matière d’interprétation du droit, comme celles exposées dans la Convention de Vienne, lorsqu’il est comme en l’espèce nécessaire d’interpréter des dispositions juridiques afin de leur donner un sens. Par conséquent, le sens littéral que peut revêtir un mot n’est pas forcément déterminant car le sens de ce mot doit être examiné à la lumière de la disposition juridique applicable et plus largement d’autres dispositions connexes. L’objet et le but des dispositions ainsi que leur genèse doivent également être pris en considération (cf. par exemple le cheminement de la Grande Chambre de recours pour statuer dans les décisions G 3/98, JO OEB 2001, 62, G 2/99, JO OEB 2001, 83 et G 1/98, JO OEB 2000, 111 ; cf. également décisions G 1/83, JO OEB 1985, 60, T 128/82, JO OEB 1984, point 9 des motifs, et J 16/96, JO OEB 1998, 347, point 3 des motifs).
2.3 En ce qui concerne l’article 4G de la Convention de Paris, l’argument du requérant, selon lequel en cas de pluralité de demandeurs, il convient de considérer l’emploi du terme “demandeur” au singulier en ce qu’il fait référence à chacun des codemandeurs pris individuellement, est uniquement motivé par le fait que cette interprétation est linguistiquement possible. Rien dans l’article 4G de la Convention de Paris ne permet néanmoins de conclure que l’emploi du terme “demandeur” au singulier vise à signifier qu’en cas de pluralité de demandeurs chaque codemandeur aurait, à titre individuel et indépendamment des autres codemandeurs, le droit de diviser la demande de manière à pouvoir déposer en son seul nom une demande divisionnaire pour une partie de l’objet de la demande initiale. Par conséquent, l’argument du requérant selon lequel le fait d’interpréter la règle 25 CBE comme signifiant que, dans le cas d’une pluralité de demandeurs, le terme “demandeur” s’applique à tous les demandeurs conjointement est en conflit avec l’article 4G de la Convention de Paris.
2.4 Il est exact qu’à la différence de la règle 25 CBE, l’article 76 CBE n’utilise pas le terme “demandeur” et a recours à la voix passive pour définir les conditions relatives au dépôt d’une demande divisionnaire. Il est toutefois intéressant de noter qu’au début des travaux sur la CBE, l’article 68(1) – à l’époque où il n’existait pas encore de projet de règlement d’exécution et, par conséquent, de règle 25 CBE – prévoyait déjà que “Der Anmelder kann die europäische Patentanmeldung teilen”, c’est-à-dire que le demandeur pouvait diviser la demande de brevet européen (conclusions de la deuxième réunion du groupe de travail ” Brevets” du 3 au 14 juillet 1961 à Bruxelles, IV/4860/61-D). Comme le requérant l’a lui-même souligné, l’ébauche de rédaction des dispositions de la CBE relatives aux demandes divisionnaires était fondée sur l’article 4G de la Convention de Paris. Ce dernier établit clairement que le droit de diviser la demande de brevet appartient du demandeur. Comme le requérant l’a soutenu, afin d’être cohérent avec l’article 4G de la Convention de Paris, l’actuel article 76 CBE doit donc être interprété de la même manière.
Aucune autre conclusion ne peut être tirée du fait que l’extrait des travaux préparatoires évoqué par le requérant (cf. VI.2 ci- dessus) ne traite absolument pas de la question du “demandeur”, mais se consacre exclusivement aux problèmes liés à l’article 76(1), deuxième phrase CBE, à savoir que la demande divisionnaire ne peut être déposée que pour des éléments qui ne s’étendent pas au-delà du contenu de la demande initiale telle qu’elle a été déposée. Ces discussions font apparaître que cette question a effectivement soulevé de sérieux problèmes inhérents aux demandes divisionnaires. En revanche, il n’y a aucune raison de discuter la signification du terme “demandeur” dans ce contexte, car la question de la pluralité de demandeurs est traitée dans d’autres dispositions de la CBE, par exemple aux articles 59 et 118 CBE, qui seront abordées ci-dessous.
2.5.1 L’article 59 CBE dispose qu’une demande peut être déposée par des codemandeurs. L’une des conséquences découlant de la condition d’unicité visée à l’article 118 CBE est que lorsque deux personnes ou plus déposent conjointement une demande, elles ne peuvent acquérir un statut procédural différent de celui d’un demandeur unique, puisque dans le cas contraire, chacune d’entre elles pourrait accomplir des actes de procédure différents et contradictoires, y compris le dépôt de versions différentes du brevet à délivrer. C’est pourquoi les codemandeurs n’acquièrent que conjointement le statut procédural d’un demandeur unique, ce qui signifie que par rapport à la demande, ils constituent une seule partie au sens juridique du terme et qu’ils détiennent conjointement les droits et obligations découlant de ce statut procédural. Même lorsque deux demandeurs ou plus ne sont pas codemandeurs au sens de l’article 59 CBE mais ont désigné des Etats contractants différents, leur statut de demandeurs d’une seule demande reste le même. Conformément à l’article 118 CBE, ils seront également considérés comme codemandeurs et l’unicité de la demande au cours de cette procédure n’en sera pas affectée. Par conséquent, les codemandeurs ne peuvent agir que conjointement ou par l’intermédiaire d’une personne habilitée à les représenter (cf. règle 100 CBE), et la fiction juridique contenue à l’article 60(3) CBE, selon laquelle le demandeur est réputé habilité à exercer le droit au brevet européen, s’applique conjointement aux codemandeurs pour la demande en tant que telle. Cela signifie que la fiction juridique s’applique à la demande dans son ensemble et ne peut être divisée, en particulier quelle que soit la partie de l’invention ou, dans le cas d’une demande contenant plusieurs inventions, quelle que soit l’invention qui appartient à l’un des codemandeurs en vertu des dispositions de droit substantiel visées à l’article 60(1) CBE (cf. exposé complémentaire au point 2.6 ci- dessous).
Le requérant a objecté que l’interprétation ci-dessus donnait à ces dispositions une signification particulière. Cependant, la Chambre ne peut que constater, comme au point 2.2 ci-dessus, qu’il lui appartient (ainsi qu’aux organes décisionnels) d’appliquer le droit, le cas échéant en l’interprétant.
2.5.2 Même en l’absence de dispositions spécifiques comme celles figurant aux articles 59 et 118 CBE concernant les demandeurs, la Grande Chambre de recours a estimé dans sa décision G 3/99, JO OEB 2002, 347, point 15 des motifs, relativement à une opposition formée conjointement par un groupe de personnes, qu’il y a lieu de traiter une opposition formée conjointement comme une opposition formée par une seule partie et que le groupe de co-opposants doit être considéré comme un tout, c’est-à-dire comme une seule partie. Un co-opposant pris isolément et qui n’est pas le représentant commun n’est pas autorisé à agir ou à intervenir seul (point 14 des motifs), sauf pour se retirer du groupe de co-opposants (point 20 des motifs). La Chambre ne partage pas le point de vue du requérant selon lequel cette décision ne permet de tirer aucune conclusion quant au statut des codemandeurs. Au contraire, dans sa décision, bien que la Grande Chambre ait autorisé des co-opposants à se retirer individuellement de la procédure, elle a donné une définition du statut des co-opposants selon lequel ces derniers ne constituent qu’une seule partie. Les co-opposants ont conjointement une seule qualité, à savoir la qualité de partie à la procédure, et ils ne peuvent exercer cette qualité que conjointement. Que l’un des co-opposants ait été autorisé à titre individuel à se retirer du groupe des co-opposants et ainsi, de la procédure, ne modifie pas la nature du statut juridique du groupe des co-opposants en tant que tel, qui constitue, au sens juridique, une seule partie à la procédure, et s’explique par le fait que contrairement au cas des demandeurs, la CBE ne contient aucune disposition relative au transfert du statut procédural d’un opposant.
2.6 Au cours de la procédure orale, le requérant a reconnu par principe que le droit au brevet européen en tant qu’élément du droit substantiel était traité à l’article 60(1) CBE et qu’il devait être différencié du droit formel (procédural) au brevet, qui découle du statut de demandeur inscrit, conformément à l’article 60(3) CBE. En ce qui concerne le sens de cette distinction, la Chambre a renvoyé le demandeur à Schulte, “Patentgesetz mit EPÜ”, 6e édition, Cologne 2001, § 6, note 3, et § 7, notes 5 et 6. Le requérant a objecté que les passages mentionnés ne se rapportaient qu’au droit allemand. Or, ce n’est pas exact. Les passages cités mentionnent expressément l’article 60(1) et (3) CBE et précisent que ces dispositions correspondent aux §§ 6, première phrase, et 7(1) de la Loi sur les brevets (Patentgesetz). De plus, les passages cités ont été évoqués dans le seul but d’expliquer le sens de cette distinction, sens que le requérant n’a pas contesté en tant que tel.
La Chambre ne peut adhérer à l’opinion du requérant selon laquelle le terme “demandeur” visé à l’article 60(3) CBE pourrait, dans le cas de codemandeurs, être interprété comme désignant le codemandeur qui, conformément à l’article 60(1) CBE, est propriétaire de l’invention à laquelle se rapporte l’acte de procédure (en l’espèce le dépôt de la demande divisionnaire). La différence de terminologie entre les paragraphes 1 et 3 de l’article 60 CBE (“inventeur” ou “ayant cause” dans le paragraphe 1 et “demandeur” dans le paragraphe 3) est voulue et reflète les différents aspects susvisés revêtus par un titre de propriété industrielle. La distinction opérée à l’article 60(1) CBE d’une part et à l’article 60(3) CBE d’autre part entre le droit au brevet qui dépend, en tant qu’élément du droit substantiel, de la personne qui a réalisé l’invention et le droit procédural au brevet qui est fonction de la personne qui a le statut procédural pour agir en tant que demandeur est délibérée. L’OEB ne devrait pas s’occuper des questions touchant à l’habilitation au regard du droit substantiel et ne devrait pas avoir compétence pour régler un différend quant à la question de savoir si un demandeur est légalement habilité à demander et à obtenir un brevet européen pour l’objet d’une demande particulière (G 3/92, JO OEB 1994, 607, point 3 s. des motifs). Conformément au “Protocole sur la reconnaissance”, toute question de cette nature devrait être laissée à l’appréciation des autorités nationales compétentes, en particulier des tribunaux nationaux. Au point 3.3 des motifs de la décision G 3/92, la Grande Chambre de recours a également souligné qu’un tribunal de l’Etat contractant approprié est la seule juridiction devant laquelle un demandeur habilité peut engager une action afin de faire constater son droit à l’obtention d’un brevet européen.
Dans sa deuxième requête subsidiaire, le requérant a demandé la saisine de la Grande Chambre de recours afin de savoir si la fiction juridique prévue à l’article 60(3) CBE dispensait l’OEB seulement de la nécessité d’examiner l’existence de l’habilitation au titre de l’article 60(3) CBE.
Or, les conclusions de la décision G 3/92 mentionnées ci-dessus montrent clairement que la Grande Chambre de recours a déjà répondu sans équivoque à cette question en déclarant que non seulement l’OEB n’est pas tenu d’examiner la question de l’habilitation, mais que de surcroît, il n’a pas compétence pour le faire. Par conséquent, il n’existe pas plus de question de droit d’importance fondamentale qui n’ait pas encore été résolue à ce jour que de décisions divergentes rendues par les chambres de recours.
En conclusion, les droits procéduraux qui résultent dans le cas d’une pluralité de demandeurs du dépôt de la demande initiale appartiennent conjointement aux codemandeurs inscrits pour la totalité de l’objet de la demande dans son ensemble, et au regard du droit substantiel, aucune distinction ne peut être effectuée en fonction du codemandeur auquel appartient un élément particulier de la demande.
3. L’article 61 CBE et les dispositions relatives à un transfert de droits, à savoir les dispositions combinées de l’article 72 et de la règle 20 CBE, définissent les conditions dans lesquelles l’OEB peut prendre en considération les questions de droit substantiel ou les actes de procédure accomplis par une personne autre que le demandeur inscrit. Le requérant a toutefois toujours soutenu (cf. également ci-dessous) qu’aucune de ces dispositions ne s’appliquait à la présente affaire. De plus, le requérant a d’emblée clairement souligné qu’aucune erreur n’avait été commise au sens de la règle 88 CBE et que le dépôt de la demande divisionnaire en litige au nom du seul requérant était intentionnel.
4. Dans la décision J 34/86 en date du 15 mars 1988 citée par le requérant, la Chambre de recours juridique a autorisé le dépôt d’une demande divisionnaire émanant d’une personne autre que le demandeur initial inscrit. Bien que dans un premier temps, le requérant ait accepté l’avis de la section de dépôt selon lequel cette décision n’était pas pertinente dans la présente affaire, il semble qu’au cours de la procédure orale devant la Chambre, le requérant ait considéré de nouveau que les conclusions de la chambre dans la décision J 34/86 pouvaient s’appliquer par analogie au présent dépôt de demande divisionnaire au nom d’un seul des demandeurs initiaux inscrits.
Il est exact qu’au point 3 des motifs de cette décision, la Chambre s’est exprimée de manière assez générale en déclarant qu’une personne autre que le demandeur initial pouvait également déposer une demande divisionnaire sur la base d’une cession au titre de l’article 72 CBE, sous réserve de la signature des parties au contrat.
Néanmoins, comme la section de dépôt l’a déjà souligné, le cas tranché par la décision J 34/86 concernait un ensemble de circonstances très particulières. Dans cette affaire, un tribunal américain avait ordonné au demandeur initial de céder au demandeur de la demande divisionnaire tous les titres de propriété de l’invention définie par certaines revendications de la demande initiale, et le demandeur initial avait déjà signé une cession à cet effet. Par conséquent, il était clair en l’occurrence que le demandeur initial avait admis qu’il n’était pas habilité à obtenir une protection par brevet pour l’ensemble de l’objet couvert par sa demande telle que déposée et qu’il avait déjà renoncé à l’objet ayant donné lieu à la cession (point 5 des motifs).
Dans la présente affaire, aucune information n’a jamais été donnée quant à la réaction du co-demandeur initial lorsque le requérant a déposé en son nom propre une demande divisionnaire portant sur l’objet de l’invention défini, par le requérant comme l’invention 1. Le requérant n’a même pas allégué que le codemandeur initial n’a émis aucune objection à ce sujet. Au lieu de cela, le requérant s’est borné à soutenir pendant toute la procédure qu’il était habilité à déposer une demande divisionnaire en son seul nom pour l’objet de l’invention 1.
5. La Chambre n’est pas en mesure d’accueillir l’argument du requérant selon lequel, conformément à l’article 60(3) CBE, l’OEB n’est pas autorisé à mettre en question l’habilitation du requérant à déposer la demande en litige. Dans la présente affaire, le point litigieux n’est pas de savoir si le requérant est habilité à déposer une demande en tant que telle, mais s’il est habilité à déposer individuellement en son nom propre une demande divisionnaire.
5.1 Si une demande est reconnue comme demande divisionnaire valable, elle bénéficie des dates de dépôt et de priorité de la demande initiale. Ce droit découle seulement de l’article 76 CBE. Contrairement au droit de déposer une demande “normale” conformément à l’article 75 CBE, demande qui ne peut bénéficier que de ses propres dates et de sa propre divulgation (droit dévolu à toute personne conformément à l’article 58 CBE), le droit de déposer une demande divisionnaire selon l’article 76 CBE et la règle 25 CBE et conformément à l’article 4G de la Convention de Paris est un droit procédural qui découle du statut de demandeur initial. Ce n’est pas un droit qui résulte du droit substantiel à l’invention défini à l’article 60(1) CBE.
En disposant que le demandeur peut diviser la demande, l’article 4G de la Convention de Paris est clair à ce sujet. L’interprétation du droit de déposer une demande divisionnaire au titre de l’article 76 CBE comme constituant un droit procédural qui découle du statut de demandeur initial est donc pleinement cohérente avec le texte de l’article 4G de la Convention de Paris et lui correspond parfaitement.
5.2 Par conséquent, il n’existe pas dans la présente affaire de problème analogue à celui traité dans la décision J 11/91 (JO OEB 1994, 28, point 2.3.4 des motifs) citée par le requérant et portant sur l’incompatibilité entre l’article 4G de la Convention de Paris et certains éléments d’une règle de droit de rang hiérarchiquement inférieur, tels ceux concernant la limitation du délai au cours duquel une demande divisionnaire pouvait être déposée selon le texte de la règle 25 CBE alors en vigueur.
Il est exact que dans cette décision, la Chambre a également posé la question de savoir si le “nouveau” délai introduit à la règle 25(1) CBE concernait le droit procédural ou le droit substantiel. Après avoir affirmé que la question test devait être “La nouvelle règle réduit-elle de façon importante les droits du demandeur ?”, la Chambre a répondu que l’introduction d’un délai avant la véritable clôture de la procédure lui semblait une limitation importante et injustifiée de ce droit essentiel du demandeur. Il résulte de ce qui précède que la Chambre n’a pas utilisé dans ce contexte le terme de “substantiel” dans le sens relatif au droit substantiel à l’invention tel que défini à l’article 60(1) CBE, mais dans le sens se rapportant à des limitations “importantes” des droits des demandeurs divisionnaires, par opposition aux autres conditions de forme à remplir par les demandes divisionnaires, comme le respect des délais de paiement de certaines taxes. Les passages cités par le requérant ne permettent pas de déduire l’intention de la chambre de mettre en question le fait que le droit de diviser la demande conformément à l’article 4G de la Convention de Paris était en tant que tel un droit procédural découlant du statut de demandeur initial.
6. Etant donné que la demande divisionnaire entraîne, en substance, un éclatement de la demande initiale, même si elle revêt la forme d’une nouvelle demande conformément à l’article 76 CBE, ce sont les droits acquis par la demande initiale qui s’étendent à la demande divisionnaire. Cela signifie que les droits applicables à la demande divisionnaire sur la base de la demande initiale s’étendent, mais se limitent aussi aux droits existant dans la demande initiale à la date de dépôt de la demande divisionnaire (décision J 19/96 en date du 23 avril 1996, non publiée, point 2.1.3 des motifs). Il en résulte que, conformément à la règle 25(1) CBE, la demande initiale doit encore être en instance à la date de dépôt de la demande divisionnaire. Aux termes de l’article 76(1), deuxième phrase CBE, l’objet de la demande divisionnaire ne peut s’étendre au-delà du contenu de la demande initiale telle qu’elle a été déposée (cf. par exemple décisions J 19/96, loc. cit., T 873/94, JO OEB 1997, 456). Lorsqu’un objet a été clairement et définitivement abandonné dans la demande initiale, il n’est plus permis de le revendiquer une nouvelle fois dans la demande initiale, ni de déposer une demande divisionnaire sur la base de cet objet (décision J 15/85, JO OEB 1986, 395, points 4 et 5 des motifs). Selon l’article 76(2) CBE, la demande divisionnaire ne peut désigner d’autres Etats contractants que ceux qui étaient désignés dans la demande initiale. De plus, la désignation doit encore être valable à la date de dépôt de la demande divisionnaire (décisions J 22/95, JO OEB 1998, 569, point 2.6 des motifs, J 19/96, point 2 s. des motifs). Il en résulte également que, dans le cas d’une demande initiale déposée par des codemandeurs, une demande divisionnaire ne peut par principe être déposée que conjointement par ces derniers et non par l’un d’entre eux seulement, car tous les codemandeurs initiaux n’ont le statut de partie que conjointement avec le ou les autres codemandeurs et ne peuvent dès lors exercer les droits afférents à leur statut de partie que conjointement avec le ou les autres codemandeurs.
7. En outre, une interprétation des dispositions combinées de l’article 76 CBE et de la règle 25 CBE telle qu’invoquée par le requérant pourrait entraîner une injustice en ce que le demandeur qui a décidé de déposer une demande divisionnaire en son seul nom pourrait priver les autres, à leur insu et/ou sans leur consentement, de leur droit procédural à être codemandeurs de toute demande divisionnaire déposée sur la base de la demande initiale. De ce fait, les autres demandeurs seraient également lésés dans le droit qu’ils ont au titre de l’article 60(3) CBE d’obtenir un brevet pour tout objet contenu à l’origine dans la demande initiale déposée par eux. C’est pour éviter une telle situation qu’ont été créées les règles et procédures visées aux articles 60 et 61 CBE et à la règle 20 CBE et que seuls les demandeurs inscrits sont habilités à agir dans les procédures devant l’OEB.
Etant donné que l’objet des dispositions ici en cause vise précisément à ce que l’OEB n’ait pas à examiner les questions d’habilitation, aucune présomption de bonne foi n’est applicable aux demandeurs, pas plus que l’on ne peut prendre en considération le fait, comme le soutient le réquérant, que la titularité n’a pas été contestée.
8. L’argument avancé par le requérant sur la base de la règle 17 CBE a été dûment rejeté dans la décision de la section de dépôt. Comme le requérant n’a pas véritablement contesté ce motif dans son recours, il est inutile de poursuivre l’examen de cette question dans les motifs de la présente décision. Pour ce qui est de l’impossibilité invoquée par le requérant d’inscrire une cession émanant du codemandeur initial sans contrevenir à la règle 20 CBE, au motif que le codemandeur n’a jamais été titulaire du droit à l’invention objet de la demande divisionnaire, la Chambre constate que, pour inscrire un transfert selon la règle 20 CBE, il suffit qu’un codemandeur accepte que la demande soit poursuivie au seul nom de l’autre demandeur.
9. Dans ses écritures, le requérant a signalé que la version de 1999 des Directives relatives à l’examen contenait pour la première fois une référence au principe selon lequel le droit de déposer une demande divisionnaire appartenait au demandeur initial. Le requérant n’en a néanmoins tiré aucune conclusion juridique particulière et la Chambre elle aussi n’en voit aucune. Les Directives relatives à l’examen n’ont pas pour rôle, ni d’ailleurs pour obligation, de traiter de chaque question juridique pouvant survenir au cours d’une procédure devant l’OEB.
10. La position adoptée par la Chambre concernant la présente affaire est conforme en tous points aux principes juridiques relatifs aux demandes divisionnaires appliqués jusqu’ici dans la jurisprudence susmentionnée des chambres de recours. La Chambre estime que la présente décision applique les mêmes principes juridiques à un autre aspect du dépôt des demandes divisionnaires. Quant à la question posée dans la première requête subsidiaire en vue de saisir la Grande Chambre de recours, il n’y a donc à ce jour ni question de droit non résolue d’importance fondamentale que la Chambre de recours juridique ne puisse trancher, ni de divergences par rapport aux décisions précédentes des chambres de recours au sens de l’article 112 CBE. Par conséquent, il n’y a pas lieu de soumettre à la Grande Chambre de recours la question formulée par le requérant en tant que première requête subsidiaire.
11. Le requérant a soutenu que huit des Etats parties à la CBE autorisaient, “dans certaines conditions administratives”, le dépôt de demandes divisionnaires par une partie seulement des codemandeurs initiaux. Cependant, indépendamment du fait que l’expression “dans certaines conditions administratives” est très vague et peut avoir toutes les significations possibles, la Chambre constate que cette affirmation faite à un stade très tardif de la procédure, c’est-à-dire lors de la procédure orale devant la Chambre, n’est étayée d’aucune preuve.
L’unique pièce produite par le requérant est un extrait du “Manual of Patent Practice”, 5e édition, mai 2003, décrivant la pratique au Royaume-Uni. Selon le point 15.24, cité par le requérant, une demande divisionnaire doit être déposée par le demandeur initial ou son ayant cause. De plus, lorsque plusieurs demandeurs sont cités dans la demande initiale, la demande divisionnaire peut être déposée par une partie seulement des demandeurs initiaux. Il est cependant ajouté que lorsque les demandeurs initiaux diffèrent des demandeurs de la demande divisionnaire et qu’aucune explication n’apparaît ou n’est fournie, l’agent des formalités doit soulever une objection, et la demande ne peut pas être traitée comme une demande divisionnaire en cas d’inobservation des dispositions de la section 15(4). La section 15(4) dispose, dans la mesure où elle est pertinente pour la présente affaire, que “Lorsqu’une nouvelle demande est déposée par le demandeur initial ou son ayant cause après le dépôt d’une demande de brevet et avant la délivrance du brevet …”.
Le texte de cette disposition montre que même au Royaume-Uni, l’affirmation du requérant selon laquelle le droit et la pratique dans ce pays admettent, “dans certaines conditions administratives”, le dépôt d’une demande divisionnaire par une partie seulement des demandeurs n’est pas exacte d’un point de vue juridique. La section 15(4) autorise le dépôt d’une demande divisionnaire par l’ayant cause. Conformément au point 15.24 du “Manual”, l’acquisition d’un droit par un ayant cause doit être démontrée. Dans le cas contraire, la demande ne peut être traitée en tant que demande divisionnaire. L’acquisition d’un droit par un ayant cause n’est pas une condition administrative mais une exigence importante en matière de procédure qu’une personne autre que l’ensemble des demandeurs initiaux doit respecter pour être habilitée à déposer une demande divisionnaire en son seul nom.
Les conditions autorisant un ayant cause à agir en tant que demandeur est une question relevant du droit national applicable. La règle 20(3) CBE prévoit la nécessité de produire des documents convainquant l’OEB que le transfert a eu lieu.
Or en l’espèce, le requérant a soutenu tout au long de la procédure qu’il n’y a pas eu d’acquisition de droit, mais qu’il était habilité de plein droit à déposer une demande divisionnaire en son seul nom. Le document produit par le requérant ne permet pas de conclure que dans le droit et la pratique au Royaume-Uni, la présente situation juridique aurait été considérée de la même manière qu’une acquisition de droit par un ayant cause, ni qu’il en aurait été ainsi dans les autres Etats parties à la CBE.
12. La Chambre conclut par conséquent que lorsque deux demandeurs ou plus ont déposé conjointement une demande (la “demande initiale”) et que les conditions de l’article 61 et de la règle 20(3) CBE n’ont pas été observées, le droit de déposer une demande divisionnaire sur la base de la demande initiale au titre de l’article 76 CBE n’appartient que conjointement aux demandeurs initiaux inscrits, et non à l’un d’entre eux ou à une partie d’entre eux seulement.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.