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European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2002:T013101.20020718
Date de la décision : 18 Juillet 2002
Numéro de l’affaire : T 0131/01
Numéro de la demande : 95926656.0
Classe de la CIB : F16J 15/32
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande :
Nom du demandeur : Mather Seal Company
Nom de l’opposant : CR Elastomere GmbH
Chambre : 3.2.01
Sommaire : Si un brevet a fait l’objet d’une opposition au titre de l’article 100a) CBE pour absence de nouveauté et défaut d’activité inventive par rapport à un document de l’état de la technique et si l’absence de nouveauté a été motivée conformément à la règle 55c) CBE, une motivation spécifique portant sur le défaut d’activité inventive n’est ni nécessaire – étant donné que la nouveauté est une condition préalable pour déterminer si une invention présente une activité inventive et que cette condition préalable ne serait pas remplie – , ni généralement possible sans contredire le raisonnement présenté à l’appui de l’absence de nouveauté.
Dans un tel cas, l’objection de l’absence d’activité inventive n’est pas un nouveau motif d’opposition et peut donc être examinée durant la procédure de recours sans le consentement du titulaire du brevet (cf. point 3.1 de l’exposé des motifs).
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 100(a)
European Patent Convention 1973 Art 104(1)
European Patent Convention 1973 Art 114(2)
European Patent Convention 1973 R 55(c)
European Patent Convention 1973 R 71a(1)
Mot-clé : Recevabilité du recours (oui)
Recevabilité de l’opposition (oui)
Absence d’activité inventive eu égard à un état de la technique soi-disant destructeur de nouveauté invoquée comme motif d’opposition dans l’acte d’opposition, mais pas spécialement motivée
Nouveau motif d’opposition (non)
Arguments présentés tardivement (non exclus au titre de l’article 114(2) et de la règle 71bis(1))
Requête en répartition des frais (rejetée)
Exergue :

Décisions citées :
G 0009/91
G 0010/91
G 0004/92
G 0007/95
T 0220/83
T 0213/85
T 0937/91
T 0514/92
T 1002/92
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0952/99
T 1077/00
T 1105/00
T 0174/01
T 1226/01
T 1192/02
T 0281/03
T 0448/03
T 1027/03
T 0428/05
T 1579/05
T 0353/06
T 0635/06
T 0597/07
T 1052/07
T 1553/07
T 1225/08
T 1142/09
T 2430/09
T 2589/12
T 0496/15
T 0710/15

Exposé des faits et conclusions

I. L’intimé est titulaire du brevet européen n° 0 771 398 (demande n° 95 926 656.0).

Les revendications indépendantes 1 et 10 du brevet délivré s’énoncent comme suit :

“1. Dispositif d’étanchéité d’arbre (8), comprenant :

un disque annulaire en matière plastique (14) qui présente un bord extérieur et un bord intérieur (35) concentriques autour d’un axe central (47) du disque, ledit disque ayant une surface d’étanchéité (16) qui vient en contact avec une surface d’arbre (18) autour du bord intérieur du disque ; et

des premières (27) et des deuxièmes (29) gorges en spirale formées dans ladite surface d’étanchéité pour le pompage de liquide par l’intermédiaire desdites gorges dans les deux sens de rotation de l’arbre ; caractérisé en ce que lesdites premières gorges (27) s’étendent en spirale dans une première direction radialement vers l’extérieur par apport audit axe central (47) et lesdites deuxièmes gorges (29) s’étendent en spirale dans une deuxième direction opposée, radialement vers l’extérieur par rapport audit axe central (47) ; et chaque gorge en spirale (27, 29) définit au moins une spire complète dans chacune desdites première et deuxième directions autour de l’axe central (47), lesdites gorges (27, 29) étant décalées de sorte que chaque spire de ladite première gorge (27) coupe une spire correspondante de ladite deuxième gorge (29).”

“10. Procédé de fabrication d’un disque d’étanchéité d’arbre hydrodynamique bidirectionnelle (14) en une matière plastique, ledit procédé comprenant la formation d’une première gorge en spirale (27) dans ladite matière plastique, qui s’étend en spirale radialement vers l’extérieur sur au moins une spire complète dans une première direction (57), et la formation d’une deuxième gorge en spirale (29) dans ladite matière plastique, qui s’étend en spirale radialement vers l’extérieur sur au moins une spire complète dans une deuxième direction (28) opposée à ladite première direction de sorte que lesdites première et deuxième gorges en spirale se coupent mutuellement (51).”

II. Le requérant a fait opposition au brevet en faisant valoir l’absence de nouveauté et d’activité inventive eu égard au document :

DE-A-2 021 382, ci-après dénommé le document cité DE.

Dans l’acte d’opposition, le requérant a fait valoir, à titre de précaution pour le cas où le titulaire du brevet contesterait les arguments relatifs à la nouveauté, que le document cité DE antériorisait l’objet de la revendication de telle sorte que l’homme du métier ne devrait pas recourir à une activité inventive. Le requérant n’a pas approfondi la question.

III. Dans une décision postée le 22 janvier 2001, la division d’opposition a rejeté l’opposition

considérant que

– l’opposition était recevable eu égard au motif de l’absence de nouveauté, qui avait été dûment invoqué et étayé, conformément à la règle 55c) CBE ;

– l’absence d’activité inventive alléguée n’avait pas été motivée dans l’acte d’opposition, mais uniquement pendant la procédure orale. Cette motivation n’ayant pas été jugée pertinente à première vue, elle a décidé de ne pas en tenir compte en faisant usage de son pouvoir d’appréciation à la lumière de la jurisprudence.

A ce propos, il ressort du procès-verbal de la procédure orale qu’il avait été fait mention de la règle 71bis (1) CBE ainsi que des directives relatives à l’examen, E-III, 8-6.

IV. Le 27 janvier 2001, le requérant (opposant) a formé un recours contre cette décision et acquitté la taxe de recours prévue.

L’exposé des motifs du recours a été produit le même jour.

V. Une procédure orale devant la Chambre a été tenue le 18 juillet 2002.

Le requérant (opposant) a demandé que la décision litigieuse soit annulée et le brevet européen révoqué dans son intégralité.

L’intimé (titulaire du brevet) a demandé que le recours soit rejeté et le brevet maintenu tel que délivré. En outre, il a demandé que les frais soient répartis au cas où la Chambre accepterait l’absence d’activité inventive comme motif d’opposition.

VI. A l’appui de sa requête, le requérant a essentiellement fait valoir les arguments suivants :

i) Le brevet européen a fait l’objet d’une opposition pour absence de nouveauté eu égard au document cité DE, et pour absence d’activité inventive eu égard à ce même état de la technique. Il n’a pas été contesté que le motif de l’absence de nouveauté avait été suffisamment justifié, conformément à la règle 55c) CBE. La question de savoir si l’invention revendiquée est dénuée d’activité inventive par rapport à un document de l’état de la technique ne se pose que si l’exigence de la nouveauté est remplie, c’est-à-dire s’il existe une différence entre l’invention revendiquée et l’état de la technique. Il ressort de ce qui précède qu’il n’est en principe pas possible, normalement, de motiver l’absence d’activité inventive eu égard à un document de l’état de la technique, sans contredire la conclusion à laquelle on était parvenu précédemment, à savoir que l’invention n’est pas nouvelle eu égard à cet état de la technique.

Si un opposant veut être cohérent et logique lorsqu’il conclut à l’absence de nouveauté eu égard à un document de l’état de la technique, et à l’absence d’activité inventive vis-à-vis de cet état de la technique, il n’a pas d’autre choix que de présenter des arguments comme dans le présent cas, c’est-à-dire d’alléguer que même si certaines caractéristiques de l’objet revendiqué ne doivent pas être considérées comme identiques en tout point avec celles du document de l’état de la technique, ces différences sont en tout cas très minimes et ne suffisent dès lors pas à conférer une activité inventive à l’objet revendiqué. Par conséquent, en l’espèce, l’objection de l’absence d’activité inventive eu égard à un état de la technique destructeur de nouveauté ne pouvait être mieux motivée dans l’acte d’opposition, et elle ne constitue donc pas un nouveau motif d’opposition.

ii) Le document cité DE divulgue un dispositif d’étanchéité d’arbre comprenant un disque annulaire en matière plastique. Afin d’améliorer l’étanchéité, le disque est muni d’une vis sans fin de retour ou vis de réinjection, formée par une nervure ou par une gorge hélicoïdale sur la surface d’étanchéité. Il est dit que si l’on choisit de façon appropriée le sens de l’hélice par rapport au sens normal de rotation de l’arbre, la rotation relative a pour effet de réinjecter l’huile qui a tendance à fuir derrière le joint.

Ce dispositif d’étanchéité d’arbre connu a été conçu pour ramener l’huile dans chaque sens de rotation de l’arbre. Il comprend, à la surface d’étanchéité, deux ensembles de nervures hélicoïdales dirigés en sens opposés en se croisant. Puisque les nervures hélicoïdales sont situées sur la partie tronconique du joint, elles définissent également une spirale. En outre, puisque l’introduction du document cité DE précise que l’effet de retour peut être obtenu soit par des nervures, soit par des gorges, il apparaît immédiatement à l’homme du métier lisant ce document que les nervures du mode de réalisation décrit peuvent être remplacées par des gorges. Par conséquent, le dispositif d’étanchéité d’arbre de la revendication 1 diffère de l’état de la technique simplement en ce que les gorges définissent au moins une spirale complète autour de l’axe central du joint. Dans le document cité DE, la partie tronconique active du dispositif d’étanchéité d’arbre est relativement étroite, de sorte que la gorge ou la nervure prévue dessus ne s’étend en spirale que sur environ une demi-spire. Cela signifie que la prétendue invention réside dans le choix évident d’une longueur particulière de la spirale. Il est clair que l’homme du métier confronté à un dispositif d’étanchéité d’arbre ayant une partie tronconique plus large aurait allongé la spirale de façon à obtenir un meilleur effet de retour, et à parvenir ainsi au joint d’étanchéité d’arbre revendiqué, qui n’impliquait dès lors pas une activité inventive.

Il en va de même de la revendication de procédé 10 du fait que la caractéristique supplémentaire consistant à produire les gorges en spirales par coupage était bien connue dans l’état de la technique (cf. par exemple US-A-3 857 156).

VII. L’intimé (titulaire du brevet) a rejeté en détail les arguments avancés par le requérant et fait valoir essentiellement ce qui suit :

i) En ce qui concerne la recevabilité du recours

Dans l’acte de recours, le requérant (opposant) n’a présenté d’arguments qu’à propos de l’absence d’activité inventive des revendications 1 et 10.

Il n’a pas contesté que la décision concernant la recevabilité des arguments relatifs à l’activité inventive était erronée, et n’a ni exposé, ni motivé la raison pour laquelle ces arguments étaient recevables.

Par conséquent, compte tenu de la jurisprudence constante (cf. notamment T 213/85, JO OEB 1987, 482), il a estimé que le recours était irrecevable parce que le mémoire exposant les motifs du recours était insuffisant.

ii) En ce qui concerne la recevabilité du motif invoqué de l’absence d’activité inventive

Dans la décision G 9/91 et l’avis G 10/91 (JO 1993, 408 et 420), la Grande Chambre de recours a considéré que seuls les motifs qui ont été valablement invoqués et motivés dans l’acte d’opposition doivent être examinés par la division d’opposition ou la chambre de recours.

En l’espèce, l’acte d’opposition ne mentionnait que brièvement l’absence d’activité inventive comme motif d’opposition, et ne contenait aucun fait ni aucune justification commme requis par la règle 55 c) CBE. Comme l’a souligné la division d’opposition dans sa décision, l’objection de l’absence d’activité inventive n’était dès lors pas motivée, et n’a pas été considérée comme pertinente à première vue.

Le requérant a en effet soulevé des objections basées sur l’absence d’activité inventive pour la première fois dans le mémoire exposant les motifs du recours. Cela s’est donc produit après que l’opposant eut admis que l’objection initiale relative à la nouveauté (à savoir la seule objection motivée dans l’acte d’opposition) était incorrecte et reconnu que l’objet revendiqué était nouveau. Une procédure de recours a essentiellement pour but de revoir les décisions rendues en première instance. Il n’ést pas acceptable de permettre à un opposant de soumettre des objections supplémentaires qui auraient dû être présentées en bonne et due forme dans l’acte d’opposition, conformément à la règle 55 c) CBE.

Un motif ainsi invoqué pour la première fois pendant la procédure de recours constitue donc un nouveau motif d’opposition, et est dès lors irrecevable sans le consentement du titulaire du brevet.

iii) Si, nonobstant ce qui précède, l’objection relative à l’activité inventive devait être admise, il est demandé qu’une répartition des frais au titre de l’article 104 (1) CBE soit effectuée en faveur de l’intimé eu égard à ce nouveau motif.

iv) Quoi qu’il en soit, l’état de la technique disponible n’avait pas pour effet de rendre nouveau l’objet des revendications 1 et 10.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours

La Chambre n’est pas en mesure de suivre les arguments de l’intimé concernant l’irrecevabilité du recours.

Il est vrai que dans la décision T 213/85 (cf. supra) citée par l’intimé, la chambre a considéré qu’au sens littéral, l’expression “exposant les motifs” signifie que, pour satisfaire aux critères de recevabilité, le mémoire exposant les motifs du recours doit préciser pourquoi, selon le requérant, la décision attaquée ne peut être maintenue, ou, pour reprendre la formulation de la décision T 220/83, JO OEB 1986, 249, doit exposer les motifs de droit ou de fait qui justifieraient l’annulation de la décision (point 4 de l’exposé des motifs). Cela ne signifie toutefois pas pour autant qu’un recours qui ne conteste pas les motifs exposés dans la décision attaquée est automatiquement irrecevable (cf. les diverses décisions citées au point VII-D, 7.5.2 de la Jurisprudence des chambres de recours, 4e édition 2001).

En outre, en l’espèce, la division d’opposition a en fait rejeté l’opposition qui était basée sur l’article 100a) CBE (absence de nouveauté et d’activité inventive), parce qu’elle a estimé que l’objet du brevet litigieux satisfaisait aux exigences de nouveauté et d’activité inventive. La division d’opposition est donc arrivée à la conclusion que les motifs d’opposition mentionnés à l’article 100a) CBE ne s’opposaient pas au maintien du brevet tel que délivré (article 102(2) CBE), et a rejeté par conséquent l’opposition.

Le mémoire exposant les motifs énonce clairement les raisons de fait pour lesquelles le requérant estime que cette conclusion n’ést pas exacte et que la décision doit donc être annulée. Il ne fait aucun doute que le motif de l’absence d’activité inventive était suffisamment étayé dans l’exposé des motifs. Cela n’a pas été contesté par l’intimé (opposant).

Il s’ensuit que l’exposé des motifs satisfait à l’exigence de l’article 108, troisième phrase. Etant donné que le recours remplit également les autres conditions énoncées aux articles 106 et 107, ainsi qu’à la règle 64 CBE, il est recevable.

2. Recevabilité de l’opposition

En l’espèce, le brevet européen a fait l’objet d’une opposition au titre de l’article 100a) CBE, au motif qu’il était dénué de nouveauté eu égard au document cité DE, et qu’il était dépourvu d’activité inventive eu égard à ce même état de la technique. Il n’est pas contesté que le motif de l’absence de nouveauté a été correctement invoqué et étayé dans l’acte d’opposition, comme prévu à la règle 55c) CBE. La Chambre est donc convaincue que l’opposition est recevable.

Même si l’on admet que l’acte d’opposition ne contient aucune justification à l’appui du le motif de l’absence d’activité inventive, comme l’a soutenu la division d’opposition, cela ne rend pas pour autant l’opposition irrecevable eu égard à ce motif, puisqu’il est bien établi, dans la jurisprudence des chambres, qu’une opposition est recevable si au moins un des motifs d’opposition est dûment étayé conformément à la règle 55c) CBE, comme c’est le cas en l’espèce (cf. point 12 de l’exposé des motifs de la décision G 9/91, supra). En d’autres termes, une opposition ne saurait être recevable “en partie” ; elle est soit recevable, soit irrecevable.

3. Recevabilité du motif invoqué de l’absence d’activité inventive

3.1 Dans la décision G 7/95 (JO OEB 1996, 626), la Grande Chambre de recours a considéré que les objections concernant l’absence de nouveauté et l’absence d’activité inventive au titre des articles 54 et 56 CBE sont des bases juridiques différentes au sein de l’article 100a) CBE, et qu’il s’agit par conséquent de deux motifs d’opposition différents. En outre, selon la décision G 9/91 et l’avis G 10/91 (supra), un motif d’opposition nouvellement invoqué “ne doit en principe pas être présenté au stade du recours. … Pourtant, une exception au principe susmentionné se justifie, en l’occurrence dans le cas où le titulaire du brevet accepte qu’un nouveau motif d’opposition soit pris en considération” (point 18 de l’exposé des motifs).

En l’espèce, l’intimé (titulaire du brevet) a fait valoir que l’objection tirée de l’absence d’activité inventive était un nouveau motif d’opposition, et n’a pas accepté son introduction au stade du recours. Il se pose dès lors la question de savoir si le motif de l’absence d’activité inventive dans le présent cas est un nouveau motif d’opposition, et plus précisément, si ce motif devait être développé en détail, compte tenu du fait que si un état de la technique détruit la nouveauté de l’objet revendiqué, cet objet ne peut à l’évidence impliquer une activité inventive, comme cela a été souligné dans la décision G 7/95 (point 7.2 de l’exposé des motifs).

Le formulaire standard EPO 2300.2-04.89 indique, dans la case concernée, que l’objet du brevet européen n’est pas brevetable (article 100a) CBE). La case indiquant qu’il est dénué d’activité inventive (articles 52(1), 56 CBE) a été marquée d’une croix. En outre, il ressort du dernier paragraphe figurant à la page 4 de l’acte d’opposition que l’objet revendiqué n’était pas considéré comme inventif par rapport au document cité DE, même si, la revendication 1 comprenait des caractéristiques qui n’étaient pas présentes sous une forme identique dans cet état de la technique, puisque ces caractéristiques auraient été évidentes pour un homme du métier.

Avant de faire cette déclaration, le requérant a expliqué en détail, dans son acte d’opposition, pour quelle raison, selon lui, il n’existait aucune différence entre le joint d’étanchéité d’arbre revendiqué et celui qui était divulgué dans le document cité DE, et conclu que l’objet revendiqué n’était pas nouveau par rapport à cet état de la technique. Même si cette motivation a été présentée dans le cadre de l’absence de nouveauté, il faut, lorsque l’on examine le motif de l’absence d’activité inventive, tenir compte du fait que la question de l’activité inventive eu égard au seul même document de l’état de la technique ne peut, d’un point de vue logique, être examinée que s’il existe une différence entre l’invention et l’état de la technique, c’est-à-dire s’il y a nouveauté.

Bien qu’il ait été décidé, dans l’affaire G 7/95 (supra), que les motifs concernant l’absence de nouveauté et l’absence d’activité inventive sont deux motifs d’opposition différents, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y ait pas de lien matériel entre ces deux motifs, du moins dans le cas où l’invention revendiquée doit être comparée au même document pertinent de l’état de la technique eu égard à ces deux aspects. Si l’invention revendiquée n’est pas jugée nouvelle par rapport à un document de l’état de la technique, il est logiquement impossible d’apprécier si cette invention revendiquée est inventive par rapport à cet état de la technique. Dans ce cas, la motivation d’une objection concernant l’absence d’activité inventive implique nécessairement de chercher d’éventuelles différences entre l’objet revendiqué et le document de l’état de la technique, avec le risque d’aboutir à deux raisonnements divergents au sein du même acte d’opposition, à savoir un premier raisonnement à l’appui de l’absence de nouveauté qui conclurait qu’il n’existe aucune différence, et un deuxième raisonnement à l’appui de l’absence d’activité inventive, selon lequel il existe bien quelques différences entre ce même objet revendiqué et ce même document de l’état de la technique. Dans les circonstances de l’espèce, il n’était donc pas possible, pour l’opposant, d’étayer le motif de l’absence d’activité inventive de façon plus détaillée qu’il ne l’a fait en déclarant qu’une comparaison entre le joint d’étanchéité d’arbre connu, divulgué dans le document cité DE, et celui revendiqué dans la revendication 1 ne faisait apparaître aucune différence, et que s’il existait des différences imperceptibles à ce moment-là, elles ne pouvaient être que si infimes qu’elles n’auraient pu conférer une activité inventive à l’objet revendiqué.

Si un brevet a fait l’objet d’une oppsition au titre de l’article 100a) CBE pour absence de nouveauté et défaut d’activité inventive par rapport à un document de l’état de la technique et si l’absence de nouveauté a été motivée conformément à la règle 55c) CBE, une motivation spécifique portant sur le défaut d’activité inventive n’est ni nécessaire – étant donné que la nouveauté est une condition préalable pour déterminer si une invention présente une activité inventive et que cette condition préalable ne serait pas remplie – , ni généralement possible sans contredire le raisonnement présenté à l’appui de l’absence de nouveauté.

Dans un tel cas, l’objection relative à l’absence d’activité inventive n’est pas un nouveau motif d’opposition et ne peut donc pas être examinée pendant la procédure de recours sans le consentement du titulaire du brevet.

3.2 En tout état de cause, la Chambre n’accepte pas l’argument de l’intimé selon lequel le motif invoqué de l’absence d’activité inventive n’était pas du tout étayé dans l’acte d’opposition, comme le prévoit la règle 55c) CBE. Cette disposition stipule que l’acte d’opposition doit préciser “les faits et justifications invoqués à l’appui des motifs” sur lesquels l’opposition se fonde. Le terme “commencement de preuve” est souvent utilisé pour désigner “les faits et justifications invoqués” à l’appui des motifs de l’opposition (cf. T 1002/92, JO OEB 1995, 605, point 3.1 de l’exposé des motifs).

Dans la présente affaire, l’acte d’opposition contient assurément des faits et justifications à l’appui du motif d’opposition invoqué de l’absence d’activité inventive, puisqu’il mentionne le document cité DE, l’analyse et effectue une comparaison entre le joint d’étanchéité d’arbre connu qui y est divulgué et celui qui est revendiqué dans la revendication 1. L’acte d’opposition indique également les arguments connexes à l’appui de l’absence d’activité inventive, à savoir que cette comparaison n’a fait apparaître aucune différence, et que s’il existe des différences qui ont échappé à l’analyse, elles ne sont pas de nature à conférer une activité inventive à l’objet revendiqué, compte tenu des connaissances générales d’un homme du métier. Par conséquent, ces faits et justifications à l’appui du motif de l’absence d’activité inventive répondent, du moins formellement, aux exigences de la règle 55c) CBE.

L’argument invoqué par l’intimé, à savoir que l’objection de l’absence d’activité inventive n’est pas pertinente sur le fond, concerne le fond de l’affaire et donc la question du bien-fondé de ce motif d’opposition, et non sa recevabilité. Il importe peu, s’agissant de la question de la recevabilité d’un motif d’opposition, de savoir si ce motif s’oppose au maintien du brevet.

3.3 Il est en outre à noter que les conclusions qui précèdent ne vont pas à l’encontre des principes exposés dans la décision G 7/95 de la Grande Chambre de recours qui a été citée précédemment.

En effet, il faut d’abord signaler que l’affaire traitée par la Grande Chambre de recours diffère du présent cas en ce sens qu’en l’espèce, le motif de l’absence de nouveauté – et non le motif de l’absence d’activité inventive -, a été correctement invoqué et motivé dans l’acte d’opposition.

En deuxième lieu, la décision précitée de la Grande Chambre de recours ne peut pas s’appliquer simplement par analogie à un cas dans lequel un brevet a fait l’objet d’une opposition pour le seul motif de l’absence de nouveauté eu égard à un document antérieur, et où le motif du défaut d’activité inventive n’était pas couvert par l’acte d’opposition, puisque dans le cas tranché par la Grande Chambre de recours, la conclusion ultérieure de l’absence de nouveauté conduirait inévitablement à la conclusion que l’objet revendiqué ne pouvait toujours pas présenter une activité inventive, tandis que la constatation de l’absence d’activité inventive suppose au préalable que l’objet revendiqué soit nouveau eu égard à l’état de la technique le plus proche.

Enfin, la décision précitée de la Grande Chambre de recours a trait à un nouveau motif d’opposition qui n’avait pas été invoqué ni motivé dans l’acte d’opposition. Elle ne concerne pas un motif d’opposition qui a été invoqué, mais n’aurait pas été motivé dans l’acte d’opposition, parce que les deux décisions de saisine T 937/91 et T 514/92 concernent le cas où un nouveau motif d’opposition a été invoqué pour la première fois pendant la procédure de recours.

Tout ce qui précède indique que la question traitée dans la présente décision n’a pas été résolue par la décision G 7/95 de la Grande Chambre de recours.

4. Arguments présentés tardivement

4.1 Au cours de la procédure orale devant la division d’opposition, l’opposant a expliqué pourquoi, à son avis, l’homme du métier serait de toute évidence parvenu à l’objet revendiqué en s’aidant du document cité DE.

C’est à tort que la division d’opposition a décidé de ne pas admettre ces moyens invoqués verbalement au titre de la règle 71bis (1) CBE. Comme cela est mentionné au point E-III, 8.6 des directives, cité par la division d’opposition, la règle 71bis (1) CBE précise que la division d’opposition est libre de ne pas prendre en considération de nouveaux faits ou preuves au motif qu’ils n’ont pas été présentés avant la date indiquée dans la citation, à moins qu’il ne convienne de les admettre en raison d’un changement intervenu dans les faits de la cause.

Par conséquent, les seuls nouveaux moyens qu’il est possible de ne pas prendre en considération s’ils n’ont pas été soumis en temps utile sont ceux qui sont prévus à la règle 71bis (1) CBE, à savoir les “nouveaux faits ou preuves”.

Il s’ensuit que de nouveaux arguments pertinents présentés à l’appui a faits exposés précédemment, et ce après la date indiquée dans la citation, doivent être pris en considération par la division d’opposition au titre de cette disposition.

Ainsi qu’il ressort du procès-verbal de la procédure orale, aucun nouveau fait ni aucune nouvelle preuve n’ont été soumis. Le document DE ayant été cité et analysé dans l’acte d’opposition, son contenu ne constitue pas de nouveaux faits.

4.2 Selon la Chambre, rien ne justifie non plus le fait que la division d’opposition n’ait pas admis les nouveaux arguments présentés lors de la procédure orale en faisant usage de son pouvoir d’appréciation au titre de l’article 114(2) CBE. Cette disposition, telle que libellée dans les trois langues, vise également des faits et des preuves soumis tardivement, mais non des arguments (“Tatsachen und Beweismittel” dans le texte allemand et “facts and evidence” dans le texte anglais). Dans son avis G 4/92 (JO OEB 1994, 149), la Grande Chambre de recours définit les “nouveaux arguments” comme étant non des moyens nouveaux ou preuves, “mais un raisonnement invoqué au soutien des moyens de droit et de fait” (cf. point 10 des motifs de l’avis).

Par conséquent, la Chambre estime que les arguments invoqués tardivement ne peuvent être exclus au titre de l’article 114(2) CBE.

5. Nouveauté

La Chambre est convaincue que l’objet des revendications 1 et 10 du brevet tel que délivré est nouveau eu égard au document cité DE.

Etant donné que ce point n’a pas été contesté pendant la procédure de recours, il n’y a pas de raison de le motiver davantage.

6. Activité inventive

6.1 Dans le brevet litigieux, le document de l’état de la technique US-A-4 118 856 (ci-après dénommé document cité US) est pris comme point de départ pour l’invention revendiquée.

Ce document cité US a trait à un joint d’étanchéité d’arbre présentant une surface d’étanchéité qui vient en contact avec une surface d’arbre, et des nervures ou gorges circulaires sur ladite surface d’étanchéité pour le pompage du liquide dans les deux sens de la rotation de l’arbre.

Plus précisément, ce document cité a trait à un procédé de fabrication de ce type de joint d’étanchéité d’arbre en le munissant, lorsqu’il est à l’état plat, tel une bague ou un disque, d’une série de nervures ou de gorges ayant la forme de segments de cercles non concentriques, puis en mettant sous forme tronconique au moins une partie de la bague ou du disque, de telle sorte que les nervures ou gorges circulaires prennent une forme d’hélice ou d’ellipse.

La fabrication de ce joint d’étanchéité d’arbre connu nécessite donc un procédé en deux temps, à savoir une première étape comprenant la formation de gorges non concentriques sur un disque annulaire plat, et une seconde étape comprenant la formation de la partie intérieure radiale du disque en une forme tronconique.

Par conséquent, le problème technique à résoudre par la présente invention peut être considéré comme résidant dans la mise au point d’un joint d’étanchéité d’arbre offrant une meilleure étanchéité et plus facile à fabriquer.

Ce problème est résolu par les caractéristiques ci-après, énoncées dans la revendication 1.

i) Les gorges s’étendent en spirale dans des directions opposées radialement vers l’extérieur et définissent au moins un tour complet.

ii) Le joint d’étanchéité d’arbre se présente sous la forme d’un disque annulaire en matière plastique.

Pendant le procédé d’installation du joint d’étanchéité d’arbre selon l’invention revendiquée, le disque annulaire en plastique a sa partie radiale intérieure courbée axialement, afin de rouler sur l’arbre et de constituer ladite surface d’étanchéité. Le joint d’étanchéité d’arbre revendiqué est plus simple à fabriquer, puisqu’il n’est pas nécessaire de passer à l’étape suivante, à savoir de donner à sa partie radialement intérieure une forme tronconique, et que les gorges en spirale peuvent être fabriquées par une opération de coupage continue. Ce joint offre en outre une grande surface de contact entre les gorges et l’arbre et, partant, de meilleurs effets de retour et de pompage.

6.2 Le joint d’étanchéité d’arbre divulgué dans le document cité DE diffère sensiblement, de par sa nature et sa configuration, de celui qui est exposé dans le brevet en litige. Si l’élément principal du joint d’étanchéité revendiqué est un disque annulaire plat en plastique présentant deux faces d’extrémité axiales plates, le joint d’étanchéité d’arbre décrit dans le document cité DE est une bague d’étanchéité moulée, avec une section transversale profilée en U, ayant une paroi cylindrique extérieure, une paroi tronconique intérieure et une partie formant pont qui s’étend radialement. Les ensembles de nervures ou de gorges hélicoïdales orientés en sens opposé sont moulés sur la paroi tronconique intérieure de la bague d’étanchéité. La paroi cylindrique extérieure de la bague d’étanchéité est raidie par un insert à section en L, tandis que la paroi tronconique est entourée par un ressort annulaire.

L’utilisation de gorges en spirale qui s’étendent au moins sur une spire complète (à distinguer de la caractéristique i) ci-dessus) n’est pas exposée ni suggérée dans le document cité DE et ne peut dès lors être considérée comme rendue évidente par l’enseignement de ce document.

La Chambre n’accepte pas l’argument du requérant selon lequel l’utilisation de gorges qui s’étendent sur plus d’un tour complet est la seule façon d’améliorer le joint d’étanchéité selon le document cité DE, de façon à élargir la paroi intérieure tronconique relativement étroite pour obtenir un meilleur effet d’étanchéité. Par exemple, les dimensions transversales des gorges et de leur pas pourraient être modifiées, et d’autres changements apportés. De surcroît, cet argument est basé sur un raisonnement a posteriori, puisque le document cité DE ne suggère aucunement que l’utilisation d’un tour de spirale complet améliorerait certainement le joint d’étanchéité.

Les caractéristiques distinctives i) et ii) mentionnées ci-dessus ne sont donc pas exposées, ni suggérées dans le document cité DE. Par conséquent, même si l’homme du métier envisageait d’appliquer l’enseignement du document cité DE au joint d’étanchéité d’arbre connu du document cité US, il n’aboutirait pas à l’enseignement revendiqué.

6.3 En conséquence, la Chambre considère que l’objet de la revendication 1 ne peut pas être déduit de façon évidente de cet état de la technique et qu’il présente de ce fait une activité inventive (article 56 CBE).

7. Les revendications dépendantes 2 à 9 ont trait à des modes de réalisation particuliers du joint d’étanchéité d’arbre revendiqué dans la revendication 1, et sont donc également admissibles.

Etant donné que le joint d’étanchéité d’arbre selon la revendication 1 est nouveau et inventif eu égard à l’état de la technique, il en va nécessairement de même pour la revendication indépendante 10, relative à un procédé qui donne inévitablement lieu à la fabrication du joint d’étanchéité d’arbre revendiqué dans la revendication 1.

La méthode selon la revendication indépendante 10 présente donc également une activité inventive (article 56 CBE).

8. Les motifs d’opposition ne s’opposent dès lors pas au maintien du brevet tel que délivré.

9. Requête en répartition des frais

La requête en répartition des frais au cas où la Chambre viendrait à accepter le motif d’opposition de l’absence d’activité inventive est apparemment basée sur la prétendue motivation tardive de ce motif. Toutefois, comme cela a été expliqué plus haut, l’objection de l’absence d’activité inventive eu égard au document cité DE a été valablement soulevée dans l’acte d’opposition, et dans les circonstances de l’espèce, sa motivation ne peut être mise en cause. Cette requête n’est donc pas fondée et doit être rejetée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. Le recours est rejeté. 2. La requête en répartition des frais est rejetée.