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European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T073695.20001009
Date de la décision : 09 Octobre 2000
Numéro de l’affaire : T 0736/95
Numéro de la demande : 83901979.1
Classe de la CIB : C07K 13/00
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande : (Met-1,des-Cys1,des-Tyr2,des-Cys3) interféron gamma humain et séquence d’ADN qui le code
Nom du demandeur : AMGEN INC.
Nom de l’opposant : Boehringer Ingelheim GmbH
Chambre : 3.3.04
Sommaire : S’agissant d’un nouveau motif d’opposition invoqué après le délai d’opposition, la Grande Chambre de recours a reconnu, dans la décision G 10/91, que l’objectif de la procédure en matière de brevets consistant à éviter des brevets non valables vient au tout premier plan pour ce qui concerne la procédure devant la première instance, en indiquant que la première instance devait au moins examiner si un motif d’opposition nouvellement introduit était pertinent. Par conséquent, en l’espèce, la division d’opposition aurait dû examiner si le nouveau motif soulevé au titre de l’article 100c) CBE était pertinent avant de déclarer qu’il était irrecevable.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 99(1)
European Patent Convention 1973 Art 100(a)
European Patent Convention 1973 Art 100(b)
European Patent Convention 1973 Art 100(c)
European Patent Convention 1973 Art 114(1)
European Patent Convention 1973 Art 102(3)
European Patent Convention 1973 R 55(c)
European Patent Convention 1973 R 66(1)
Mot-clé : Recevabilité d’un nouveau motif d’opposition – pertinence
Obligation pour la division d’opposition d’examiner la pertinence d’un nouveau motif d’opposition
Renvoi à la première instance pour suite à donner – oui
Saisine de la Grande Chambre de recours – non
Exergue :

Décisions citées :
G 0010/91
G 0001/95
T 0922/94
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0084/04
T 0179/07
T 1519/08
T 1286/14

Exposé des faits et conclusions

I. L’opposition que le requérant a formée contre le brevet européen n 0 108 128 a été rejetée par la décision attaquée. Les motifs d’opposition invoqués dans l’acte d’opposition étaient l’absence de nouveauté et d’activité inventive (article 100 a) CBE) ainsi que l’insuffisance de divulgation (article 100 b) CBE). Au cours de la procédure devant la division d’opposition, le requérant a également soulevé le motif prévu à l’article 100 c) CBE, soutenant que le brevet européen s’étendait au-delà du contenu de la demande telle qu’elle avait été déposée. La division d’opposition n’a pas admis ce dernier motif dans la procédure.

II. Le requérant a demandé que la décision attaquée soit annulée et que le brevet soit révoqué.

III. L’intimé a demandé que le recours soit rejeté.

IV. La recevabilité du motif d’opposition prévu à l’article 100 c) CBE et invoqué par le requérant a été examinée lors de la procédure orale qui s’est tenue devant la chambre de recours. Sur ce point, les parties ont essentiellement développé les arguments suivants :

Le requérant a allégué que bien que ce motif n’ait pas été mentionné dans l’acte d’opposition, il a été invoqué environ dix-huit mois plus tard et environ seize mois avant que la procédure orale devant la division d’opposition ait eu lieu. La division d’opposition et l’intimé avaient donc amplement le temps de l’examiner. La division d’opposition aurait dû admettre ce motif comme éminemment pertinent. C’est en réalité ce qu’elle a fait en examinant la question sous l’angle de la nouveauté dans le cadre de la revendication de priorité (pages 5 à 7 de la décision attaquée). Cela signifie qu’admettre ce motif dans la procédure ne créerait aucune nouvelle situation de droit ou de fait qui serait contraire à l’essence même des décisions G 10/91 (JO OEB 1993, 420) et G 1/95 (JO OEB 1996, 615). Les faits sur lesquels se fondaient ces décisions de la Grande Chambre de recours étaient sans rapport avec les circonstances de la présente affaire, dans laquelle un motif éminemment pertinent avait été rejeté comme irrecevable lors de la procédure d’opposition. Il y aurait donc lieu de saisir la Grande Chambre de recours. La décision T 922/94 du 30 octobre 1997 avait trait à une situation similaire à celle prévalant dans la présente espèce, où le motif prévu à l’article 100 c) CBE n’avait pas été mentionné dans l’acte d’opposition, mais avait en fait été abordé par la division d’opposition dans la motivation de sa décision. La chambre de recours avait décidé d’admettre ce motif dans la procédure de recours, puisqu’il n’en résulterait pas de nouvelle situation de droit ou de fait. Si, dans la présente espèce, la chambre devait ne pas être disposée à examiner cette question, ni à la trancher, l’affaire pourrait soit être renvoyée à la première instance pour qu’elle examine cette question, soit faire l’objet d’une saisine de la Grande Chambre de recours.

L’intimé a fait valoir que les décisions G 10/91 et G 1/95 ont enfermé l’introduction de nouveaux motifs d’opposition dans de strictes limites, en ce sens qu’un nouveau motif d’opposition est irrecevable, sauf si le titulaire du brevet consent à ce qu’il soit admis dans la procédure, ce qu’il n’a pas fait en l’espèce. Sinon, un nouveau motif d’opposition non invoqué dans l’acte d’opposition ne peut être examiné dans le cadre d’une procédure de recours que si la division d’opposition elle-même l’a introduit dans la procédure d’opposition. L’intimé ne s’opposerait pas à ce que la Grande Chambre de recours soit saisie, ou à ce que l’affaire soit renvoyée à la première instance pour qu’elle examine le nouveau motif soulevé au titre de l’article 100 c) CBE. Selon la décision G 1/95, ce motif ne peut cependant être examiné par la chambre de recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Le motif invoqué par le requérant au titre de l’article 100 c) n’était pas mentionné dans l’acte d’opposition. Il convient donc de se demander s’il peut bien être examiné conformément à l’article 114(1) CBE et eu égard à la jurisprudence de la Grande Chambre de recours, en particulier aux décisions G 10/91 et G 1/95, qui donnent une interprétation de cette disposition. La décision T 922/94 semble moins pertinente, étant donné que dans cette affaire, la division d’opposition avait reconnu que le motif invoqué tardivement au titre de l’article 123(2) CBE était pertinent et l’avait admis. Aussi, ayant considéré que ce motif s’était inscrit dans le cadre juridique de l’opposition et que l’admettre dans la procédure ne soulèverait pas une question de droit nouvelle, la chambre avait donc décidé de l’examiner. De surcroît, les dispositions combinées de l’article 102(3) CBE et de la règle 66(1) CBE confèrent une large latitude aux chambres de recours pour examiner toutes objections, émises ou non, auxquelles peuvent donner lieu des modifications apportées aux revendications telles qu’elles ont été déposées. En l’espèce, au contraire, le nouveau motif a été rejeté comme irrecevable. Autre différence par rapport à la situation qui prévalait dans l’affaire T 922/94, les revendications du brevet tel qu’il avait été délivré n’ont pas, dans la présente espèce, été modifiées.

3. La décision G 10/91 (point 16 des motifs) a analysé le cadre dans lequel s’inscrit l’examen par la division d’opposition de motifs non invoqués dans l’acte d’opposition. La Grande Chambre de recours n’avait alors pas estimé qu’il était justifié de changer la pratique consistant à examiner de nouveaux motifs dans la procédure d’examen ou d’opposition, conformément à l’article 114(1) CBE. Cette pratique visait manifestement à éviter le maintien de brevets européens non valables. Aussi la Grande Chambre a-t-elle conclu qu’une division d’opposition peut soulever ou examiner d’office un tel motif si celui-ci est invoqué par l’opposant après l’expiration du délai prévu à l’article 99(1) CBE. La Grande Chambre a toutefois déclaré qu’il ne devrait en être ainsi que dans des affaires où, de prime abord, il existait des raisons évidentes de considérer que ces motifs étaient pertinents et qu’ils s’opposaient en tout ou en partie au maintien du brevet européen.

4. A la lumière du passage cité, il semblerait que l’argument de l’intimé, selon lequel la Grande Chambre limite la portée d’une opposition strictement à ce qui est indiqué dans l’acte d’opposition conformément à la règle 55c) CBE, ne soit valable que pour la procédure de recours. Dans la présente espèce, la division d’opposition a décidé, conformément à l’article 114(1) CBE, de ne pas admettre le nouveau motif d’opposition, sans indiquer aux parties qu’elle considérait ce motif comme moins pertinent. S’il est exact que, dans la décision G 10/91, il est indiqué que la division d’opposition peut, à sa discrétion, décider d’admettre ou non de nouveaux motifs (“une division d’opposition peut soulever d’office … ou examiner un motif invoqué par l’opposant”), les Directives relatives à l’examen pratiqué à l’OEB, partie D, chapitre V, 2.2, prévoient cependant que des faits qui, de prime abord, sont susceptibles de s’opposer au maintien total ou partiel du brevet, doivent en général être pris en considération par la division d’opposition, tout en veillant à l’économie de la procédure. Les Directives renvoient dans ce contexte à la décision G 10/91. Conformément à la partie E, chapitre VI, 1.1, qui fait référence à l’article 114(1) CBE, l’instance compétente doit observer cet article dans toute procédure qui se déroule devant elle et examiner s’il existe des faits ou des preuves susceptibles de prime abord de s’opposer au maintien du brevet. Les Directives ont également été citées dans la décision G 10/91 de la Grande Chambre de recours.

5. Il ressort de la jurisprudence de la Grande Chambre de recours, notamment des décisions G 10/91 et G 1/95, ainsi que des Directives relatives à l’examen pratiqué à l’OEB que l’objectif de la procédure en matière de brevets consistant à éviter des brevets non valables vient au tout premier plan pour ce qui concerne la procédure devant la première instance. En ajoutant qu’elle ne voyait pas de raison de changer la pratique suivie par la première instance, la Grande Chambre a indiqué que la première instance devait au moins examiner si un motif d’opposition nouvellement introduit était pertinent. Par conséquent, avant de déclarer que le motif invoqué au titre de l’article 100 c) CBE était irrecevable, la division aurait dû, conformément à l’article 114(1) CBE, examiner s’il était susceptible de faire obstacle au maintien du brevet. En ne le faisant pas, et en justifiant son refus d’admettre ce motif uniquement par le fait qu’il avait été invoqué tardivement, la division d’opposition a privé le requérant de la possibilité de faire examiner dans le cadre d’une procédure de recours si ce motif était pertinent et, partant, s’il était recevable.

Compte tenu de la décision G 10/91 et des passages des Directives cités ci-dessus, la Chambre n’estime pas nécessaire de saisir la Grande Chambre de recours, mais considère en revanche qu’il convient de renvoyer l’affaire à la division d’opposition pour suite à donner. Il conviendra d’examiner la question de savoir si le motif invoqué par le requérant en vertu de l’article 123(2) CBE (article 100 c) CBE) est susceptible de faire obstacle au maintien du brevet, ainsi que toute autre question susceptible de découler de la réponse donnée à cette première question.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L’affaire est renvoyée à la première instance pour suite à donner.